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A Gaza, l’échec de plus en plus patent de la stratégie d’Israël : "Le Hamas revient à la surface"

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A Gaza, l’échec de plus en plus patent de la stratégie d’Israël :

Où se trouve donc Yahya Sinouar, le tout-puissant chef du Hamas dans la bande de Gaza ? Contre toute attente, il ne serait pas caché à Rafah, près de la frontière égyptienne, sous la protection des troupes les plus fournies du groupe terroriste ayant mené l’attaque meurtrière du 7 octobre. Selon les renseignements américains et israéliens, il n’aurait pas bougé de son bastion, le dédale de tunnels – en partie intacts – sous le champ de ruines qu’est devenue la cité de Khan Younès, un peu plus au nord.

Près de sept mois après le début de l’offensive terrestre sur l’enclave gazaouie, le 27 octobre 2023, les forces israéliennes ne sont toujours pas parvenues à mettre hors d’état de nuire celui que leurs dirigeants qualifiaient d’"homme mort qui marche". Pire : ses troupes reprennent le contrôle des territoires que l’armée israélienne assurait avoir "nettoyé" de tous combattants avant de s’en retirer. "Nous avons vu le Hamas revenir dans les zones qu’Israël a libérées dans le Nord, et même à Khan Younès", s’est ému le secrétaire d’État américain, Antony Blinken.

Malgré son incontestable supériorité, l’armée israélienne n’a pas le contrôle du terrain gazaoui et se retrouve à mener des raids dans des secteurs qu’elle l’avait évacués il y a quelques semaines, considérant qu’ils étaient pacifiés. Ses soldats ont ainsi été envoyés combattre une nouvelle fois près du camp de Jabaliya, où elle explique que "le Hamas tente de reconstituer ses capacités militaires". A Zeitoun, à l’ouest de Gaza-ville, on en est même au troisième assaut.

"En fait, les Israéliens continuent d’appliquer à Gaza, comme depuis vingt ans, leur stratégie dites de ‘la tondeuse à gazon’ : ils pénètrent sur un territoire en détruisant autant que possible l’adversaire qui s’y trouve, avant de se retirer, pour éviter de s’embourber, comme auparavant dans le sud du Liban, explique l’ancien colonel des troupes de marine Michel Goya, auteur de L’Embrasement, Comprendre les enjeux de la guerre Israël-Hamas (Éditions Perrin et Robert Laffont). L’inconvénient de cette méthode, c’est que si on ne contrôle pas le terrain, l’ennemi le réoccupe rapidement, et il faut à nouveau repasser la tondeuse…"

"On est clairement dans une impasse"

Des raids pourraient-ils être à nouveau organisés sur Khan Younès, où se trouverait Yahya Sinouar ? Après plusieurs mois d’hésitation, Tsahal a finalement lancé une opération, le 6 mai, sur la partie est de Rafah, dans la partie sud de Gaza. La ville sert de refuge à un million de Gazaouis ayant fui les combats du nord et de Khan Younès, mais c’est également un bastion du Hamas : quatre bataillons du groupe palestinien s’y trouvent encore, soit un objectif majeur pour des autorités israéliennes résolues à détruire les capacités militaires du mouvement islamiste.

Près de 450 000 personnes ont déjà fui les bombardements des derniers jours. Il n’est pas certain, pourtant, que Tsahal répète à Rafah l’opération d’ampleur déjà menée dans la ville de Gaza, à l’automne, puis à Khan Younès en début d’année - l’offensive ne concerne pour l’instant que les abords orientaux de Rafah. Alors que plus de 35 000 personnes, dont une majorité de civils, auraient été tuées dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre, selon le Hamas, Washington a mis en garde les autorités israéliennes contre toute manœuvre susceptible d’aggraver une situation humanitaire déjà catastrophique. Un tel plan "risque de provoquer d’énormes dégâts auprès de la population civile sans pour autant résoudre le problème", a prévenu Antony Blinken. A cette raison s’ajoute l’impopularité croissante aux Etats-Unis de l’action israélienne, qui provoque d’importantes dissensions au sein du parti démocrate.

Au-delà des mises en garde américaines, l’opération militaire se heurte à l’absence de débouchés politiques pour l’accompagner. "On est clairement dans une impasse, constate David Khalfa, codirecteur de l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient de la Fondation Jean-Jaurès. Il faudrait une traduction politique des succès tactiques de l’armée israélienne, mais en l’absence de stratégie politique, ceux-ci s’amenuisent." L’état-major s’en plaint dorénavant ouvertement dans la presse, en expliquant que le pouvoir politique se révèle incapable de capitaliser sur les victoires de l’armée.

Le Premier ministre, Benyamin Netanyahou, n’a, pour l’heure, défini aucune orientation quant à l’avenir politique de l’enclave. "Il n’existe actuellement que deux solutions alternatives au régime civil du Hamas : un gouvernement militaire israélien ou un retour de l’Autorité palestinienne dirigée par Mahmoud Abbas, avec l’assistance active d’une force de police arabe, financée par des pays qui entretiennent des relations avec Israël, estime l’éditorialiste Ron Ben-Yishai dans les colonnes du Yediot Aharonot, le premier quotidien du pays. Mais Netanyahou et son gouvernement ne sont prêts à approuver aucune des deux, et le résultat est que le Hamas revient à la surface."

Résolu à conserver coûte que coûte le pouvoir, Netanyahou se trouve pris en étau entre ses partenaires d’extrême-droite, qui sont prêts à chasser les populations de Gaza pour y réimplanter des colonies et ses alliés centristes, qui veulent que la priorité aille aux 128 otages (36 seraient morts, selon Tsahal) et à un cessez-le-feu permettant leur libération.

L’embourbement du moment se traduit par un pessimisme grandissant au sein de la population israélienne. Le pourcentage des juifs israéliens très optimistes quant à l’avenir de l’État d’Israël est passé de 48 %, en mars, à 37 % récemment, selon le Jewish People Policy Institute. Et la confiance dans les chefs militaires a chuté de 75 % à 59 %. "Les familles des réservistes commencent à exprimer leur mécontentement, à quoi bon envoyer les leurs s’il faut reprendre sans cesse les territoires auparavant nettoyés, fait valoir David Khalfa. Il y a un scepticisme croissant quant aux buts de guerre annoncés, alors que l’impasse saute aux yeux des Israéliens, y compris ceux de droite, ce qui est une nouveauté."

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