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Bal des artilleurs à Madrid : 2 à 1 (*)

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Ah sans mon pote Angelo, le Lionel Messi des nettoyeurs de surface (pas les 5,50 m), je n’aurais pas fait attention à l’apparition d’un étrange club de foot en Coupe d’Europe. Mon phénomène, mon artiste du balai, qui scrute également toutes les infos d’un œil attentif, et pronostique les matchs souvent avec justesse (au contraire de moi (1)), m’a en effet interpellé hier en me disant que le club ayant battu le Real venait « d’un drôle de pays » avec « des dirigeants pas très clairs ». Entendez par là des trafiquants… de tout, et surtout d’armes, car nous revoici, en effet, 13 ans après que j’en avais parlé, de la Transnistrie, sorte de Bordurie d’Hergé, mais bien réelle, et à Tiraspol exactement, cette fois, avec des joueurs arborant de façon bien visible le logo du club et de la principale entreprise du pays appelée Sheriff (avec deux « f »). Derrière les hommes au maillot noir – à l’extérieur – se dissimulerait-il une entreprise… de blanchiment ? A l’évidence, et sans surprise même ! Angelo, c’est simple, était tombé pile (encore une fois, le bougre !).

Le football et les trafics, dont celui de drogue, je l’ai déjà évoqué ici avec des cas pendables, au Mexique ou en Argentine notamment,  et récemment encore. Des mafieux se sont aussi insinués dans des transactions juteuses de footballeurs, pour blanchir leur argent sale. Certains clubs ne disposant pas d’écoles de football ont ainsi pu bâtir des équipes performantes de toutes pièces en achetant tout un lot de footballeurs étrangers, parfois en alpaguant de vieilles gloires (portant des maillots d’escrocs lire ici), sans avoir à passer par la case structurelle habituelle, sans aucune école de foot à entretenir. C’est exactement le cas du club du jour, venu de l’Est, qui depuis deux décennies maintenant est devenu l’incontournable club du pays, trustant la première place du championnat local… de façon outrancière, devenu à sa façon une sorte de PSG aux petits crampons européens…. en quelque sorte (1). Chez le FC Sheriff Tiraspol, ça a pris des dimensions assez dantesque au regard de la taille du pays. « On » a en effet injecté des millions de dollars dans l’affaire, et surtout dans un sel club, dans des joueurs étrangers, le béton d’un stade immense, etc….

Une équipe ou un patchwork de nationalités ?

Le club rassemble en effet un de effectifs les plus étonnants existant : « si le club phare de Transnistrie a sifflé la fin de la récréation, c’est donc uniquement grâce à un des contingents les plus hétéroclites jamais vu sur le Vieux Continent (2). Ce dernier rameute près de 19 nationalités différentes en son sein, du Malawi à Trinité-et-Tobago. Entre deux Grecs indésirables au pays mais en pleine cure de jouvence (Athanasiádis un gardien, prêté-  et Kolovós), un Luxembourgeois comme point d’ancrage au milieu (Thill, auteur du but somptueux de mardi dernier-), un roc péruvien de quasiment deux mètres pour guider et stabiliser la défense (Dulanto, ici en train de prendre soin de Karim Benzema) et des recrues toujours plus exotiques en sortie de banc (Nikolov, un macédonien, Bruno, un brésilien et Yakhshiboev; un ouzbek,  les derniers en date), l’alliage détonne forcément au milieu des check-points. » Tous attirés par.. l’argent du club, pas comparable du tout à ses voisins immédiats : « sa manne financière imposante lui permet en outre de payer ses joueurs à hauteur de 15 000 dollars le mois. Honnête en comparaison avec les grosses écuries. Abyssale si on met ces salaires en perspective avec ceux des autres footballeurs moldaves, lesquels peinent à amasser quelques centaines de dollars sur le mois, quand ils sont rétribués dans les temps »… (3)

Trafics en tous genres et bordels : la classe des dirigeants du club !

La préoccupation étant d’où vient l’argent qui a permis de réunir cette armée de mercenaires footballeurs et qui surtout à allongé les billets (verts) : le responsable de la chose s’appelle Victor Gushan (ici à gauche).  « Gushan a fondé Sheriff avec deux associés. L’un d’eux est inconnu, l’autre se nomme Korzun. Propriétaire de luxueux châteaux-hôtels-bordels, Korzun est également président du club Tiligul-Tiras, un autre club basé à Tiraspol, dont les joueurs ont le privilège de pouvoir s’entraîner sur les installations du FC Sheriff. Sur l’origine de leurs fortunes respectives, rien. Pas une ligne. Pour beaucoup, le groupe est une simple organisation mafieuse destinée à blanchir de l’argent pour le compte de Smirnov et cie (le nom du président du pays à l’époque). L’OSCE déplore la situation sans pouvoir agir: «La manière dont la société Sheriff s’est développée n’est pas claire, et l’identité de ses propriétaires est floue. Elle aurait été créée par 3 anciens officiers de police, qui avaient pris part aux combats de 1992. En quelques années, Sheriff s’est imposé comme le principal propriétaire de supermarchés du pays, entre autres activités», déclare-t-elle après une visite en Transnistrie en 2005. Plus qu’hégémonique, la société Sheriff est en fait devenue une institution en Transnistrie: le blason du club figure sur l’envers d’une pièce de 100 roubles frappée en 2003. Au revers figurent la faucille et le marteau. Une pièce d’une monnaie illégale qui résume à elle seule l’imaginaire et la réalité d’un pays n’existant pas: la nostalgie soviétique d’un côté et les dérives de l’économie capitaliste de l’autre ». Très parlant, en effet (cf ici à droite), à faire retourner la momie de Lénine dans son sarcophage !

Un club vitrine d’un pays qui n’existe pas !

Cela s’est fait façon Sheriff, c’est à dire au pas de charge, avec un flot d’argent ininterrompu venant de trafics divers ; alcool, drogue, armes, tout à été bon pour alimenter ce désir fou de devenir un grand club de foot (de l’argent qui a beaucoup servi à blanchir, donc). En 2009, déjà, dans « Parlons foot« , on avait remarqué cette gestion étrange de club : « dans ce pays en friche, Tiraspol ne dépareille pas. Seul brille dans la capitale le complexe sportif Sheriff. Une sorte de halo lumineux digne d’une entrée dans la 4e dimension au sein de la grisaille ambiante. Deux concessions Mercedes-Benz et Skoda trônent à son entrée, ainsi qu’une station-service et un supermarché Sheriff. Fondé le 4 avril 1997, le FC Sheriff truste depuis sa création quasiment tous les trophées nationaux. Le meilleur club moldave est en effet la vitrine de la Transnistrie séparatiste! Et comble de tout, le complexe du FC Sheriff, ainsi que son stade, est le seul à être approuvé par la FIFA. Conséquence: l’équipe nationale moldave y dispute ses matchs internationaux (nota : la Transnistrie n’étant reconnue nul par comme pays, le FC Tiraspol se déclare Moldave à la FIFA, qui n’y voit donc goutte dans la magouille (3) !). Le stade de 13 000 places est considéré comme l’un des meilleurs du continent, et a été décoré de l’ordre du Mérite du centenaire de la FIFA alors que les stades de Chişinau, la capitale moldave, n’ont pas toujours l’eau courante dans leurs vestiaires. Les dirigeants transnistriens ne peuvent qu’en profiter pour narguer une Moldavie roumanophone impuissante face à cette puissance financière, et écraser les rivaux de la capitale, et le Zimbru Chişinau en particulier ». Ici à droite leur stade, nettement moins clinquant que celui du Sheriff FC, qui est assez grand pour contenir environ le 1/10 des habitants de la ville. Avec la même jauge, le stade Stantiago Bernabéu à Madrid devrait afficher 320 000 places ! C’est la cathédrale du XXI eme siècle !!!

Le béton coulé… aussi bien que l’argent sale

Le stade du Sheriff FC (ici à gauche) est en effet assez incroyable : « le complexe Sheriff comporte 8 terrains d’entraînement, une piste d’athlétisme, deux salles d’échauffement avec gazon synthétique, un hôtel 5 étoiles et une piscine. Comment ce projet pharaonique, pour un pays pauvre de 600 000 habitants, a-t-il pu voir le jour? Et qui plus est dans une région séparatiste en lutte contre le pouvoir central? Le club est une émanation du groupe Sheriff, un groupe d’une puissance rare possédant quasiment tout en Transnistrie: supermarchés, stations-service, chaîne de télé (TSV, la télé du libre choix), réseau de téléphonie (Interdnestrcom), etc). Les installations du FC Sheriff, modernes à en faire pâlir Milanello, sont estimées à 60 millions d’euros. Mais officiellement, le club a déboursé… 200 000 euros pour la construction du stade. Ce montant couvre l’importation de l’écran géant, de la pelouse synthétique et chauffée et de l’éclairage. Tout le reste à été construit et financé en interne par la firme de BTP de Sheriff, son premier business officiel depuis 1997″. En résumé, c’est de l’autoproduction, en quelque sorte, et un coulage d’argent sale avant d’être un coulage de béton !!!

Des pratiques discutables

Il y a 12 ans déjà on avait remarqué ces étranges pratiques de recrutement essentiellement étranger (à droite c’est l’équipe fanion actuelle, en jaune le plus souvent) : « si le club ne communique pas sur son origine, son fonctionnement actuel est assez simple. Le club recrute à tours de bras des joueurs brésiliens, africains ou roumains à des prix minimums puis les revend avec de belles plus values. En font partie le Roumain Răzvan Cociş  aujourd’hui international et licencié au Lokomotiv Moscou, et le Béninois Omotoyossi, aujourd’hui à Metz. Cette saison, les stars du club sont Nadson José Ferreira, un attaquant brésilien de 24 ans acheté à Santos (ici à gauche), et le Géorgien Vaja Tarkhnishvili. Des joueurs sur lesquels le club compte pour une prochaine plus value ». Et si les joueurs demandent une augmentation, on les renvoie, tel le camerounais Anatole Ambang … ou certains refusent même parfois d’y aller, comme ici le sénégalais Serigne Daour Dia, qui a refusé un contrat de 4 ans avec le FC Sheriff  pour une raison très claire :  « Mon agent m’a appris que le président du club m’a proposé un contrat de 4 ans pour pouvoir gagner de l’argent quand il me transférera dans un club dans un championnat plus coté », a expliqué le joueur âgé de 21 ans qui est revenu à Dakar après avoir passé 12 jours de tests au FC Sheriff. « Je suis prêt à me sacrifier pour les miens parce que je suis un soutien de famille mais je ne peux pas rester dans ce pays où il n’y a de pas de football », a-t-il insisté, précisant que son agent, un Nigérian du nom de Elvis Aubame, lui a demandé de revenir au Sénégal à la fin de ses tests. Le milieu de terrain de la Ja est allé faire des tests en compagnie de l’attaquant du Port autonome de Dakar (Pad), Souleymane Goudiaby qui « est reparti il y a quelques jours en Albanie » (c’est un gardien de but).

L’argent amenant l’argent, le coulage et le blanchiment amorcent une pompe à fric à laquelle a succombé on se demande comment l’UEFA : « Le FC Sheriff profite également des primes offertes par l’UEFA pour ses présences régulières en coupes européennes, même si ses parcours n’ont jamais été aussi longs que cette saison. Son stade ne rapporte lui pas beaucoup, la faute à de faibles affluences en championnat. Les 3 matchs de groupes d’Europa League, face aux voisins du Steaua Bucarest, à Fenerbahçe et au FC Twente devraient eux rapporter gros. » En somme, dans ce stade, beaucoup de choses sont… artificielles !!! Ou carrément grotesques  (5) ! A droite c’est le match du 24 octobre 2013 contre Tottenham, en Europa League.

Une jeunesse laissée longtemps aux bons soins de Soin :

Le football ce sont des jeunes footballeurs. En Transnistrie, il ne semble pas y en avoir beaucoup, mais le pouvoir s’est beaucoup intéressé à cette jeunesse il y a quelque années, en tentant d’en faire une masse malléable de supporters… politiques. J’ai décrit ailleurs le phénomène : dans le pays, une organisation nationaliste, ПРОРЫВ, PRORIV ou « Breakthrough », a été fondée par un officier de haut rang des services secrets de Transnistrie (MGB), Dimitri Soin, à l’organisation entièrement copiée sur le FSB russe (le nouveau KGB).  L’homme semble passablement… dérangé. Son organisation ayant une idéologie un peu… spéciale : franchement d’extrême droite, elle voue un culte surprenant à Che Guevara, perçu comme un héros guerrier romantique, admiré par d’étranges admiratrices blondes subjuguées par le grand maître Soin. On est au bord de la dérive sectaire. Sur les sites internet de l’organisation, tous les liens mènent pourtant à des sites d’extrême droite européens, où apparaît en double notre homme en compagnie d’idéologues connus et répertoriés comme Alain de Benoist, du GRECE, à qui l’on doit le terme « pensée unique ». Ou ceux de Ratzel, sur l’« espace vital » que reprendra Hitler dans Mein Kampf. Soin est aussi le fondateur d’une pseudo-ONG, appelée Strategiya, en fait une partie de l’alliance The Young Patriots – Molodaya Gvardiya, et qui est en réalité une milice véritable, dont le passe-temps favori est d’aller détruire les bureaux des associations rivales ou des opposants politiques. Des paramilitaires, déguisés en ONG, voilà qui fait plus moderne, avec un patron portant catogan et constamment suivi par une cour de jeunes admiratrices blondes (ici à droite)… et un quatuor de gardes du corps armés. Rien ne manque à son folklore. Notre homme, en dehors de faire dans l’inhumanitaire, fait aussi, à ses heures perdues, dans la vente d’armements (le premier sport national en réalité !).

Des armes, qui se ramassent à la pelle dans le pays, il n’y a qu’à se baisser, ou entrer dans les gigantesques hangars laissés derrière eux par les russes lors de leur départ de Moldavie. Un document assez extraordinaire de Xavier Deleu demeure visible ici, en cinq épisodes successifs d’une dizaine de minutes nous en dresse le tableau, qui est effarant !!! « A heaven for arms trafficking, here… »peut-on entendre dire dans le récit, où l’on voit le général Lebed, lui qui n’était pas un ange (6), annoncer que, dans le lot, traînaient encore il n’y a pas si longtemps des armes nucléaires tactiques. Le même Lebed qui a déjà dit ailleurs que les dirigeants du pays sont une « clique mafieuse et totalement corrompue ». Il connaît bien le pays : il a été le chef de la fameuse XIVe armée russe stationnée en Transnistrie (celle qui a rempli jadis les dépôts d’armes !!!).
A droite c’est un ex dirigeant de la 24 eme armée qui déclare avoir fourni directement 24 chars aux séparatistes moldaves pro-russes. A gauche, c’est un avion russe, un  Ill- 76 pris sur le fait venant se servir sur place le 30 juillet 1992.  Un peu plus loindans le reportage, on découvre Brian Johnson Thomas, un journaliste au Sunday Times, un homme qui a de la suite dans les idées, puisqu’il réussit à piéger les autorités en quelques rendez-vous pour obtenir facilement une « bombe sale ». Une « Dirty bomb », de tout petit format, annoncée pour 200 000 dollars. Avec leur vecteur de dispersion, puisqu’il reçoit en même temps une offre pour quelques missiles Alazan radioactifs, parmi les 38 du stock existant… A droite  ici ce type de missile découvert dans une cache à Odessa en 2018. L’engin d’un mètre de long et 82 mm de diamètre seulement est très, très dangereux, car il est « spécialisé » dans la répartition à l’impact ou en vol de gaz nocifs ou de produits radio-actifs !!! Ironiquement, le modèle le plus récent, plus petit (60 cm) a été reconverti en missile anti-grêle dans le sud de la Russie !! On ne sait si on ne déclenche avant les matchs en cas de mauvaise météo annoncée !!!

Tout ceci avec comme interlocuteur exclusif… Dimitri Soin, qui entretemps à endossé un costume et s’est fait une coupe de cheveux plus présentable (ici à gauche). Le tout vendu avec la signature sur des papiers officiels du ministre de l’Environnement local, Y. B. Cheban (papiers à l’appui) ! En 2014, Soin retire son masque devenu trop visible et s’en va s’installer… à Moscou, en Russie. On le retrouve en 2018, les cheveux à nouveau long et gras), et sans masque, devenu ouvertement militant nationaliste russe, leader de l’Union du peuple russe et (déjà) ancien leader du parti politique Rodina dirigé par Sergey Baburin… L’ancien fan de Che Guevara n’a pas réussi à pervertir totalement la jeunesse !!! (Mais derrière lui, l’immense dépôt d’armes est resté là… sans avoir été vidé ni avoir été supprimé. Et il en a gardé l’adresse, visiblement (voire les clés) !!

Le bazooka à 1000 euros

Le 3 juillet 2014 on arrêtait un gang de revendeurs d’armes à Chisinau, dirigé par le malfaiteur Anton Druta (ici à gauche)  alias « Vanea” ou “Pisateli l’écrivain”. Un des journalistes enquêtant sur lui n’avait eu aucun mal à lui acheter un lance-roquettes RPG russe, modèle RPG-26 !!! Tarif : 1000 euros, 1365 dollars de l’époque (à droite la transaction filmée dans un restaurant) ! En cadeau, il lui avait été offert un pistolet russe (ici à droite) ! « Les armes provenaient de la 14e armée russe jadis stationnée dans la région séparatiste de Transnistrie, à 80 kilomètres de Chisinau ». Un autre deal découvert par les enquêteurs de l’OCCRP destiné à fournir directement le conflit ukrainien était en cours : « le plan de Druta était simple : il devait fournir 30 pistolets russes, cinq RPG et des munitions pour 29 000 € (39 500 $ US). Les armes devaient être livrées directement en Ukraine, quelque part près d’Odessa » (7).

Les comptes offshore de Shor,  fan de foot lui aussi

Qui dit argent dit banque, et là aussi le paysage n’est guère plus serein : la Moldavie a été secouée en 2014 par un énorme scandale financier. On l’a surnommé « l’Opération Titirezul » (en roumain : la toupie), qui a atteint trois banques (Banca de Economii, Unibank et Banca Socială, avec un score d’un milliard de dollars détournés à leurs clients respectifs. Le responsable porte un nom, Ilan Shor, un israélo-moldave (ici à gauche) : c’était le président du conseil d’administration de la Banca de Economii, qui avait clairement et simplement investi les dépôts de ses clients dans des investissement spéculatifs via des prêts de plusieurs millions de dollars à des entreprises opaques qu’il contrôlait lui-même une cavalcade classique. Lorsqu’il s’est éclipsé, 767 millions de dollars ont soudainement disparu des banques, et ce, en trois jours seulement : tous transférés sur des sociétés offshore affiliées à Shor, ou des comptes bancaires lettons !!! Pour remettre à flot le système, la Banque Centrale de Moldavie a été contrainte en urgence d’abonder 870 millions de dollars de prêts pour renflouer les trois banques. Le scandale avait des racines bien ancrées : c’est en 2019 seulement que le directeur adjoint des services de renseignement de la République de Moldavie, Vadim Vrabie, a admis que le Premier ministre Nicolae Timofti était au courant de la fraude depuis 2013, mais n’avait donc rien fait pour l’en empêcher… Bien que condamné à 7 ans et demi de prison en 2017, pour blanchiment d’argent, fraude et abus de confiance, mais laissé libre dans l’attente de son procès d’appel, Shor a été élu au parlement moldave en février 2019 !!! Ça donne une idée de la démocratie et de son dévoiement en Moldavie !! Nota : parmi les « investissements » de Shor, un club de football, le FC Milsami football club, champion de Moldavie en 2015 (ancien FC Viitorul Orhei), la mme année,, ils avaient battu les bulgares de Ludogorets Razgrad au sein de l’UEFA Champions League !!! Shor à l’époque, âgé de 28 ans à peine  était aussi le maire de la ville qui abritait le club  « Un homme qui fait la Une de la presse people pour son mariage avec une starlette russe » peut-on lire ici !

Un gigantesque réservoir à Kalachnikovs, à roquettes et à obus

Faire dans la vente d’armement disait-on avec Dimitri Soin, ou sans lui, et ce, sans trop de difficultés, c’est facile en Transnistrie : le pays dispose du plus grand dépôt de munitions laissées par les forces soviétiques lors de leur retrait de la Moldavie. Un édifiant documentaire de Canal+ et Capa de 52 minutes de décembre 2005 montrait le contenu de l’effarant dépôt de 132 hectares de Colbasna. 45 000 tonnes d’armes à l’effondrement de l’Union soviétique, dont il restait encore 22 000 tonnes à neutraliser en 2009 (ça n’a pas changé depuis, hélas !). « En 1999, la Russie a promis d’évacuer cet inquiétant arsenal d’ici fin 2002. En dix-huit mois, seuls trois convois ferroviaires sont partis. D’après les calculs de l’OSCE, il en faudra environ 400 supplémentaires. Si la cadence est maintenue, l’évacuation des stocks ne sera donc terminée qu’aux alentours de l’année 2150… » En fait le gigantesque dépôt (ici de 2005 à 2020, avec aucune modification des bâtiments) n’a été vidé partiellement que par un seul homme, n aujourd’hui en prison aux USA…

La mine d’approvisionnement de Victor Bout

Formé au GRU, le renseignement militaire soviétique, Viktor Bout, puisqu’il s’agit de lui, bien sur, a installé sa première compagnie aérienne au Kazakhstan, puis d’autres en Moldavie (Aerocom et Jet Line, notamment installées à Chisinau) et en Europe (à Ostende, mais ça vous le savez déjà je doute), comme je l’ai déjà écrit également il y a plus de 10 ans. Ce n’est pas à négliger dans son cursus : à Ribnita (ou est installée la « Moldova Steel Works” qui rapporte 60% du budget du pays !) et Tiraspol, en Moldavie, ont été installés les deux plus grands arsenaux de l’ex-URSS, avec le dépôt de Colbasna.

Dans cet amoncellement d’armes en tout genres, Bout avait de quoi puiser pour alimenter des guerres pendant des années. Il ne s’en est pas privé, comme d’autres ne se sont pas privés de le faire en Albanie, autre pays transformé entièrement en dépôt de munitions, dictature paranoïaque oblige. La guerre froide et la crainte d’une invasion américaine terrestre ont fabriqué ces amoncellements incroyables d’armes légères qui ont fini par ruiner l’économie soviétique toute entière (et ses satellites). Pour évacuer dans le reste du monde, il fallait des moyens discrets : les trains étant contrôlés aux frontières et les containers sur les quais (bien que les exportations par bateau aient été florissantes), il restait les vols nocturnes, avec des avions démunis de tout marquage ou en arborant de faux. C’est là où va exceller pendant plusieurs décennies Viktor Bout. L’homme qui a transporté la poudre à canon par quadriréacteurs va se faire un malin plaisir en effet de vider (en partie seulement) les dépôts faramineux des soviétiques et de la Guerre Froide !!! A droite l’A droite, l’Ilyushin IL-76TD  EW-76734 de Trans Avia Export (un des paravents de Viktor Bout) atterrissant à Francfort et souvent aperçu à Bourgas ou Tirana. A gauche c’est l’exemplaire ER-IBV en photo à Chisinau, son fief moldave. Et en haut le plus connu, le TL-ACU de  Centrafrican Airlines (République centrafricaine) qui a été aussi ensuite 3C-QRA (Guinée équatoriale), S9-DBX (Sao Tomé-et-Principe) et aujourd’hui 3X-GGT (Guinée) !!!

Faudra-t-il attendre qu’il explose pour qu’on se rende compte que rien n’a été fait depuis deux décennies ?

L’équivalent albanais du dépôt de Colbasna, celui de Gerdec, sautait le 15 mars 2008,  dans une gigantesque explosion ressentie comme une explosion nucléaire par les habitants alentour (lire ici le désastre). Maria Dulgher, dans un article du 9 août 2020 rappelait la terrible explosion de Beyrouth aux mêmes effets ou presque : « après l’explosion de Beyrouth, certains politiciens et experts de la République de Moldavie ont entamé des discussions, tout en exprimant leur inquiétude, concernant le plus grand dépôt de munitions d’Europe de l’Est situé dans le village de Cobasna, qui relève de la juridiction de Tiraspol. Le dépôt figure en permanence sur la liste des « alertes rouges » de l’OSCE, qui a fréquemment attiré l’attention sur cette bombe à retardement sur le territoire de la République de Moldavie. Le député Mihai Popsoi, membre du Parti de l’action et de la solidarité (PAS), s’est dit préoccupé par les conséquences d’une éventuelle explosion dans ce dépôt. « Ce dépôt de la Fédération de Russie représente un danger pour les citoyens de Moldavie. C’est pourquoi les anciennes munitions doivent être évacuées d’urgence ou détruites avec des équipements spéciaux », a déclaré le député » (à gauche le paysage désolé à Gerdec après l’explosion). « L’opposition estime que la solution bien connue, à savoir l’évacuation immédiate des munitions, n’est pas mise en pratique principalement en raison de l’obéissance à la Russie des autorités de Chisinau, en premier lieu du président Igor Dodon. D’innombrables pourparlers et négociations sur l’évacuation des munitions de la région n’ont pas donné de résultats. « Le problème est qu’au cours des deux dernières décennies, l’accès au dépôt n’a été autorisé à aucun observateur international. Les informations ne sont fournies que par le régime séparatiste ou le contingent de la Fédération de Russie », a déclaré l’ancien ministre de la Défense, Vitalie Marinuta (…) En cas d’explosion, comme l’a déclaré Marinuta en se référant à une étude menée par l’Académie des sciences de la République de Moldavie, la puissance de l’explosion serait équivalente à celle d’une bombe atomique de 10 tonnes ». Comme à Gerdec ! Qu’en pense la nouvelle présidente moldave, la proeuropéenne Maïa Sandu, qui a déclaré vouloir rejoindre l’Union européenne ? Qu’en pense l’Europe, d’hériter d’un tel tas de poudre toujours prêt à exploser ? Les européeens avaient déjà payé pour vider Gerdec (en confiant la mission aux Américains qui ont joué avec : on sait comme ça s’est terminé – par un film hollywoodien, comme d’habitude : War-Dogs, assez fidèle dans l’esprit) !!!

Le football européen et l’UEFA sont donc assis sur une poudrière, mais ça n’a rien à voir avec les droits de retransmission télés, ou le salaire faramineux de certains joueurs. En acceptant le club de Sheriff FC, cette instance footbalistique qui a accepté un club issu d’un pays reconnu nul part ailleurs qu’en Russie joue tout simplement avec le feu. Ce qui, près d’un tas de poudre, peut s’avérer ma foi fort dangereux, on le sait…

(*) le titre est un hommage à vieux gag d’un journal local, la Voix du Nord, qui continue à me faire rire, quarante ans après les faits. C’est lors d’un match d’une obscure division, près de Dunkerque si je me souviens bien, avec un match qui s’était terminé par une avalanche de buts, genre 7-0. Le journaliste avait titré « bal des artilleurs à Leffrinckoucke » pour célébrer l’écrasante victoire du club. Le lendemain le club avait reçu une injonction de déclarer « les morceaux de musique joué au bal » par un inspecteur de la SACEM qui, manifestement, ne s’arrêtait que sur quelques mots pour faire croire qu’il faisait son job consistant à dépouiller la presse et traquer les contrevenants !!! Ici, le Tiraspol Sheriff FC, club de marchands d’armes notoires, aurait pu se voir affublé du même titre !!!

Nota : le dépôt de Colbasna n’est pas le seul à présenter autant d’armes légères en stockage. En Azerbaïdjan aussi l’un d’entre eux est énorme (ici à droite) : on le visite ici en vidéo,(c’est effarant !)  et en photos dans cet article. Il y a là des milliers d’armes, dont des obus au phosphore, notamment. Les caisses ont servi en partie lors du dernier conflit avec l’Arménie. Un autre dépôt inquiétant était celui d’Udmurtia, encore une zone devenue indépendante et laissée à l’abandon dans l’Oural  entre les rivières Kama et Vyatka, auquel il faut ajouter celui à ciel ouvert du Bashkortostan (République de Bachkirie) située entre la Volga et les Monts Oural, dans l’est de la Russie européenne.  On y a vu en 2010 des soldats s’y activer pour le démanteler mais on ignore son sort actuel. Laissées carrément à l’air libre, les armes présentaient un fort potentiel de dangerosité. C’était de loin le plus inquiétant (voir ici).

 

(1) après une année au moins de pronostics infructueux de ma part, j’ai fini par lui demander comment faisait-il pour soumettre les bons à chaque fois ou presque… Avec un large sourire moqueur, il m’avait répondu ; « c’est simple : je dis tout le contraire de toi ». Ce qui vous donne une idée à la fois mes talents et sa faculté d’observation, très prononcée chez lui !! Depuis, j’évite de les faire en premier… mais il y arrive toujours ! Ce gars est un devin, l’ectoplasme de Daniel Leclercq (« le Druide »), il pourrait démarrer une secte ou mettre en difficulté la Française des Jeux et ses boules rebondissantes !!!

(2) « Le club domine totalement le football moldave, remportant chaque édition de la Divizia Naţională de 2001 à 2021, à l’exception de 2011 et 2015. L’équipe a également remporté la Coupe de Moldavie à dix reprises depuis 1999 ainsi que la Coupe de la CEI en 2003 et en 2009. Le FC Sheriff est également le premier club de Moldavie à faire signer des joueurs brésiliens et africains » (Wikipedia). Voir ici le même avis.

(3) et en prime un malien de 26 ans, Adama Traoré, dont personne n’avait voulu selon l’Equipe : « sous contrat avec Metz jusqu’en février dernier, l’ailier malien ne s’était contenté que de huit entrées en jeu, toutes en Ligue 2, depuis son arrivée en Lorraine en 2018. Débarqué cette saison au Sheriff Tiraspol, Traoré est déjà entré dans l’histoire du club moldave en inscrivant le premier but de son histoire en Ligue des champions. Et de quelle façon : un ciseau au point de penalty(ici à droite) pour ouvrir le score lors de la victoire contre le Chakhtior Donetsk (2-0). Moins en vue contre le Real Madrid, le joueur de 26 ans est un élément incontournable du onze de Yuriy Vernydub. Une belle revanche pour l’ancien messin qui a enchaîné les prêts ratés à Orléans (L2) en 2018-2019 et à Al-Adalah (Arabie saoudite) en janvier 2020. Il a inscrit 16 buts en 34 matches à Tiraspol ».

(4) « Pour autant, avec un effectif estimé à 11,8 millions d’euros, selon le site spécialisé Transfermarkt, le Sheriff ne pèse quasi rien en Europe. A des années-lumière des 783,5 millions du Real Madrid. »

(5) Grotesque en effet : « depuis que les autorités de Tiraspol ont fait sécession de la Moldavie en 1992, cinémas, théâtres et salles de concert ont fermé tour à tour en Transnistire. Il n’y a guère que les stades de football qui soient restés debout, offrant aux 500 000 habitants de la petite région séparatiste l’un des rares moyens d’échapper à leur quotidien. Conscient de l’importance de cet opium footballistique, le régime permet aux clubs locaux de jouer en championnat moldave. Une concession à son hostilité envers le pouvoir central de Chişinău, mais aussi un coup diplomatique, alors qu’aucun État au monde ne reconnait l’indépendance de la Transnistrie ». En somme, ce sont des séparatistes qui ne le sont pas quand ils jouent au foot !!! C’est surréaliste !

(6) mort dans un accident d’hélicoptère MI-8 le près d’Abakan dans les monts Saïan). il avait déjà été écarté (placé dans l’ombre d’un Poutien émergeant) et obligé de s’exiler en Sibérie « Le gouverneur de la vaste région de Krasnoïarsk n’aura donc jamais connu la fin de son exil politique. Les steppes sibériennes auront été son tombeau, au sens propre comme au figuré. Depuis son élection au poste de gouverneur, en 1998, dans cette zone de la Sibérie orientale, Alexandre Lebed, qui venait de fêter ses 52 ans, n’était plus qu’un fantôme de la politique russe après avoir été le plus populaire des généraux, un temps pressenti pour être le successeur de Boris Eltsine. » Parmi ces soutiens incongrus de l’époque, celui d’Alain  Delon !! Comme il avait négocié un accord de paix avec les rebelles tchétchènes, Moscou été obligé de se retirer  du territoire séparatiste. Une « trahison de la Russie » selon Vladimir Poutine : d’où les tenaces rumeurs de sabotage de son hélicoptère…

(7) je vous ai trouvé un étrange site qui vous propose de tirer au Bazooka, comme activité de loisir, ici à Moscou (????). On peut faire du char à St Petersbourg) et du L-39 (pour 80 000 roubles -950 euros-  les 20 minutes !). Le tourisme à la russe c’est euh.. spécial. Il font aussi dans le « mini-char », un beau sommet de crétinerie !

Document à consulter :

« There’s a new “Sheriff” in Town: Corruption and Captive Markets in Transnistria », de 2012, signé  Michael Bobick à trouver ici. Extrait représentatif :  « les supermarchés Sheriff sont connus pour leurs dates d’expiration créatives. Des amis m’ont averti d’éviter les produits laitiers, expliquant qu’ils achèteraient du stock périmé, modifieraient les dates de péremption et le vendraient comme frais. Étant donné que les importations moldaves étaient taxées de manière prohibitive à 100 %, le shérif n’avait aucune concurrence et pouvait dicter les conditions de vente, puisqu’aucun autre fournisseur ne pouvait exister dans la région. Sheriff est également connu pour son traitement sévère des travailleurs, et en raison de la situation économique précaire, ils disposent d’une réserve illimitée de main-d’œuvre dans la région. Dans la section des alcools, tous les vins et spiritueux (à l’exception du vin de Moldavie) n’ont pas de timbres douaniers. Les cigarettes vendues au Sheriff ne portent pas non plus de timbres douaniers. Souvent, les produits de marque occidentale trouvés dans Sheriff sont contrefaits. Un chercheur étranger en visite à Tiraspol a acheté une brosse à dents Colgate contrefaite qui a entraîné des saignements des gencives et du déodorant Old Spice qui a laissé une éruption cutanée. L’émergence de la région en tant que soop pour les denrées alimentaires importées du marché gris a décimé les producteurs alimentaires locaux, car leurs produits sont désormais non rentables. Bien qu’elle possède certaines des terres agricoles les plus productives de Moldavie, la région importe une quantité disproportionnée de sa nourriture. »

Sans oublier Netflix..

 

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