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« Des footballeurs comme les autres » : une équipe de joueurs atteints d'un handicap engagée en 4e division du Cantal

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À ses joueurs rassemblés autour de lui sur le terrain, Fabrice Boljesic prévient : « Ce soir, ça va piquer ! Ça va brûler ! Il faut faire les exercices à fond afin de bien préparer le prochain match. » Il est 18 heures, ce premier jeudi du mois d’octobre, au stade municipal de Reilhac. L’heure de l’entraînement pour la vingtaine de joueurs de la section foot du Reilhac omnisports. Et pas question de le rater ou d’arriver en retard pour les sportifs. « Ils sont impatients de venir, pour rien au monde, ils ne louperaient ce rendez-vous », assure Fabrice Boljesic, qui a, lui aussi, « hâte de les retrouver ».

Tous souffrent d’un handicap mental, d’une maladie psychique ou d’autisme

Âgés de 17 à 64 ans, certains travaillent en Esat, d’autres sont en foyer de vie, tous souffrent d’un handicap mental, d’une maladie psychique ou d’autisme. « Mais quand ils sont sur le terrain, ce ne sont plus des adultes handicapés mais des sportifs, des footballeurs comme les autres », insiste leur entraîneur. « Lui, ce n’est pas un bon gars, plaisante Enzo, en prenant Fabrice Boljesic par les épaules. C’est un Marseillais ! » Taquin, son coach lui demande le résultat du PSG, défait la veille en Ligue des champions. « Mais c’était Arsenal en face ! », se défend Enzo, avant de partir taper dans le ballon avec ses coéquipiers. « Tu as vu l’accélération ? »

Blessé, Nicolas est resté au bord du terrain ce soir. « Mon rôle, c’est en défense ou au milieu. Je joue à droite, car je suis droitier », explique-t-il. « Jules, qu’est-ce que j’ai dit pour les affaires ? », s’interrompt Fabrice Boljesic. « Je sais, je les ai oubliées, mais c’est la dernière fois, promis ! »Motricité, course, jeu avec le ballon, frappes… pendant une grosse heure, le groupe enchaîne les exercices dans la bonne humeur. « Ici, on ne parle pas de handicap, on est là pour prendre du plaisir ! », clame Fabrice Boljesic, qui doit répéter plusieurs fois les consignes. « Passe, contrôle et on redemande. »

Favoriser l'intégration des personnes handicapées

Longtemps cantonnée à la seule pratique de la pétanque, la section de sport adapté de Reilhac omnisports, qui a récemment pris le relais du Tilleul reilhacois, s’est ouverte au football.

« Je suis arrivé dans le sport adapté par le biais de la pétanque, je ne connaissais pas le monde du handicap. Au début, on jouait au foot pour s’amuser tous les jeudis soir. Il y en a certains qui avaient un peu de ballon. Et puis comme le moteur du sportif, c’est la compétition, on s’est dit pourquoi pas. »

Lors de sa première année d’existence en 2023, la vingtaine de pratiquants a fait ses premières armes au sein de la ligue AuRA foot de sport adapté avec de longs déplacements. « À l’autre bout de la région, précise Fabrice Boljesic. Ce qui occasionnait des frais importants même si le minibus dont la Région nous a dotés s’est avéré utile. Et, si de notre côté, nous avons joué le jeu en participant aux rencontres à l’extérieur en Ardèche ou en Haute-Loire, ce n’était pas forcément le cas pour les autres équipes au moment de venir chez nous, dans le Cantal… ».D’où cette idée de créer une équipe, évoluant dans le championnat de district du Cantal, en quatrième division départementale depuis cette saison, dans le but de favoriser l’intégration de personnes handicapées tout en allégeant les déplacements.

« Ce genre de défi, ça ne s’est jamais fait. Il a fallu trouver des sponsors qui ont cru dans notre projet, se doter d’un jeu de maillots… Un ou deux papas n’étaient pas tranquilles. Ils me disaient : “Fabrice, on ne va pas les respecter, ils vont prendre des coups, on va se moquer d’eux…” Je leur répondais que nous étions là pour les protéger. »

 « C’est une victoire d’être là aujourd’hui »

Si les deux premiers matches se sont soldés par une défaite, l’essentiel est ailleurs. « Lors de la première rencontre, quand nous sommes rentrés sur le terrain, je leur ai dit : “C’est une victoire d’être là aujourd’hui”. Bon, on en a pris treize, mais qu’est-ce qu’on s’en fout du résultat ! Je suis super fier d’eux. Ils sont motivés, investis, respectueux. Mes joueurs ont tenu quarante-cinq minutes à leur rythme. À la fin du match, nos adversaires nous ont félicités. Et c’est ça aussi qui est génial : ces rencontres sportives leur permettent d’échanger avec d’autres adultes que ceux de leur établissement, donc d’avoir plus d’interactions sociales. C’est important pour eux de pouvoir se mélanger », sourit l’ancien stagiaire pro à Gueugnon, passé par plusieurs clubs du département dont l’AFC et Arpajon.Fabrice Boljesic avait rangé ses crampons depuis 2006.

« S’ils n’avaient pas été là, je n’aurais jamais rattaqué… Quand ils sont heureux, nous sommes heureux. Et puis il y a les regards, les câlins. Ils me font grandir tous les jours. C’est plus qu’un groupe, c’est une famille. On dit que le sport, c’est la vie. Mais le sport adapté, c’est une leçon de vie. »

À terme, Fabrice Boljesic ambitionne de créer une école de foot « pour tous ces enfants, qui ont souvent du mal à trouver leur place au sein des clubs sportifs et leur permettre, enfin, de s’épanouir. »En attendant, Reilhac omnisports se déplacera à Ayrens, dimanche 20 octobre, pour le compte de la quatrième journée de championnat. « On ne lâche rien, il y a encore du travail ! » 

Emmanuel Tremet

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