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Nécrologie de l’ami qui avait « Un vélo dans la tête ».

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Jacques Pradaud (1er janvier 1935 – 26 novembre 2024)

Cinq ans après Raymond Poulidor et près de trois ans après André Dufraisse les deux présidents d’honneur de l’ARPAD ses amis avec lesquels il avait disputé tant de courses en Limousin, et parfois au-delà, Jacques Pradaud s’est éteint à son tour, à cinq semaines de son quatre-vingt-dixième anniversaire.
Avec près de deux cents victoires remportées au cours des années 1950 – 1960, il figurait parmi les meilleurs coureurs cyclistes limousins de sa génération. Il avait commencé à courir à l’âge de 17 ans, et il avait rapidement acquis sa réputation de roublard, clairvoyant, et habile sprinter. A tel point que les regrettés André et Raymond Poulidor avouaient que, dans la Région, il était leur plus redoutable adversaire, leur laissant peu de chances de gagner au sprint quand il était présent. Champion des sociétés cyclistes du Limousin-Périgord en 1954 et en 1962, puis en 1963, du Poitou-Charentes qui venait d’accueillir le comité de la Haute-Vienne, alors que ceux de Corrèze et de Creuse étaient rattachés à l’Auvergne, et celui de la Dordogne à l’Aquitaine jusqu’en mars 1966. En 1965 il empochait pour la quatrième fois le titre régional.
Ses plus beaux titres de gloire sont sans doute lorsqu’il gagne : devant les pros à Brive, les Boucles du Bas-Limousin en 1961 ; puis le championnat de Poitou-Charentes de poursuite sur la piste de Saintes en 1963 ; et en 1964 sur route celui des indépendants. 1964, c’est la saison de ses 22 victoires, dont une étape du Tour de Tunisie. C’est aussi l’année où il signe un contrat professionnel dans la prestigieuse équipe Flandria pour amener les sprints de Guido Reybroeck qui avait eu des occasions d’apprécier sa pointe de vitesse. Hélas celui-ci gagnera Paris-Tours, sans Jacky victime peu de temps avant d’un grave accident du travail dans les sous-sols de la piscine municipale de Beaublanc brisant ses rêves de gloire et d’une carrière cycliste professionnelle. Mobilisé en Algérie, fidèle à son surnom, il prétendait y avoir plusieurs fois « trompé la mort » en sautant en parachute pendant la guerre. Son service militaire accompli, il avait repris la compétition et couru jusqu’en 1966. Dès lors, il avait été dirigeant puis entraîneur de l’école de cyclisme et directeur sportif du CRCL où, comme à ses obsèques Luc Leblanc a tenu à le rappeler, il avait suivi les débuts de la brillante carrière du futur champion du Monde, en lui prodiguant généreusement ses conseils éclairés. Il a milité aussi dans plusieurs autres associations locales, toujours prêt à y rendre les services même les plus ingrats comme par exemple, en qualité de consciencieux signaleur à la cyclosportive André-Dufraisse. Toujours prêt à répondre présent chaque fois qu’il était invité à des championnats cyclistes (comme encore en août dernier aux masters de la route à Saint-Pardoux le Lac), ou à tout autre manifestation organisée en l’honneur de ses amis comme ce fut le cas pour la remise des trophées des challenges Dufraisse à Razès et Poulidor (dès le premier à Evaux-les-Bains) et plus récemment à l’inauguration de la statue de Poulidor le 24 mai dernier à Saint-Lary où il avait tenu à se faire conduire dans sa Jaguar… Tout le long des trajets aller et retour il égrenait les souvenirs de sa carrière que l’on peut retrouver racontés parmi beaucoup d’autres dans son autobiographie : « Un vélo dans la tête », publiée en 2021 « en tandem » avec Bernard Verret. Mais il parlait aussi des divers projets qu’il avait en tête : de son envie d’organiser un omnium « Raymond Poulidor » de la route autour des Cars, ou encore un cyclo-cross « André Dufraisse, à l’Espace Hermeline, proche du petit village d’Aurin, commune de Bussière-Galant où il s’était retiré dans la maison natale de sa chère Marguerite. Ainsi, pouvait-il aller plus facilement et plus souvent au volant de sa Clio, se recueillir sur sa tombe. C’est là qu’il vient de la rejoindre à l’issue de ses obsèques célébrées, dans l’église où ils s’étaient mariés, autour de sa grande famille, et en présence de ses nombreux amis.
Encore quelques jours avant de rendre l’âme, il se désolait qu’à plusieurs reprises, en cette année olympique ait été différée l’exposition honorant Michel Rousseau en mémoire de son sacre à 20 ans aux JO de Melbourne, projetée à Saint Yrieix-la-Perche où il repose depuis 2016.
Enfin comme l’a rappelé l’universitaire Jean-François Nys, son cousin par alliance, dans l’hommage qu’il lui a rendu, Jacky ne manquait pas de passes-temps qu’il aimait partager avec ses nombreux amis : chercher les champignons, pêcher dans son étang… Il savait s’occuper utilement en élevant des volailles, en jardinant, ou en bricolant. Il avait aussi un « Violon d’Ingres » : la peinture d’art (copie de tableaux de maîtres).
Mais surtout, il aurait tant voulu que lui soit décernée de son vivant la Médaille d’Or de la Jeunesse, des Sports et de l’engagement associatif, qu’il était convaincu, à juste raison, d’avoir méritée plus que tant d’autres. Aussi avait-il moyennement apprécié la réplique d’un de ses amis auprès duquel il revendiquait sa promotion : « Ne t’inquiète pas Jacky : la médaille d’or, tu l’auras à titre posthume ! »
Alors ? Chiche !

Bernard LACORRE

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