Nouvelles

Les coulisses du Tour de France, ses premiers souvenirs, sa rencontre avec Géminiani... Christian Prudhomme se confie

0 34
Les coulisses du Tour de France, ses premiers souvenirs, sa rencontre avec Géminiani... Christian Prudhomme se confie

Le retour au puy de Dôme, les coulisses du Tour, l’intérêt de plus en plus marqué du jeune public, sa rencontre récente avec Raphaël Géminiani… Pendant près d'une heure ce mardi, Christian Prudhomme a répondu aux questions de lecteurs de La Montagne, lors d’une rencontre organisée au sommet même du puy de Dôme qui accueillera l'arrivée de la 9e étape du Tour de France, le dimanche 9 juillet prochain.

Le choix des villes étapes

"Alors, je descends à la cave et je regarde ce qui me manque comme vin, un peu de Bordeaux, un peu de Bourgogne (rire). Plus sérieusement, on reçoit près de 300 candidatures, 250 de France et une cinquantaine de villes étrangères. Là-dedans, on a de plus en plus de candidatures des Conseils départementaux. Elles sont essentielles pour nous, car ils possèdent les routes. Le terrain d’expression des champions et des championnes, c’est la route. On n’a pas de stade, de parquet de basket… Nous ne sommes que locataires.

Après, le lieu du grand départ détermine énormément le trajet. Dès lors qu’on l’a désigné, on ne sait pas forcément où on ira, mais en tout cas on sait où on n’ira pas. Quand je regarde la carte du Tour, je ne la trouve pas forcément jolie, mais ce qui compte, c’est l’épreuve pendant le mois de juillet. L’un des changements opérés ces dernières années avec Thierry Gouvenou, c’est de placer au maximum deux étapes de plaine consécutives pour les sprinters.

 

Il y a aussi les figures imposées par l’Union cycliste internationale (UCI) : 21 étapes, des journées de repos. Puis, il y a la géographie de la France. Si vous tracez une ligne droite du Pays basque à l’Alsace, à l’ouest de cette ligne il n’y a pas de montagne. Si on ne se basait que sur l’aspect sportif, on serait presque tout le temps comme le Tour de cette année. On a de la plaine, de la moyenne montagne, de la haute montagne…

Dans la partie ouest, nos équipes sont dans la recherche de la moindre difficulté. Après, il y a la volonté de ne pas se contenter que des Alpes et des Pyrénées. Ces deux massifs sont indispensables au Tour. Mais on veut montrer que dans le Massif Central, le Jura, les Vosges, il y a un ‘’terrain sportivement probant’’ comme disait Jean-Marie Leblanc, c’est-à-dire, un terrain sélectif pour les champions et les championnes."Christian Prudhomme et les lecteurs de La Montagne au sommet du puy de Dôme. Photo Rémi Dugne

Les grandes villes étrangères…  et les petits villages

"La prise de vue dominante du Tour, c’est la prise de vue aérienne. Cela montre la France telle qu’elle est. On est un petit pays, mais il est tellement divers. C’est magnifique d’un endroit à l’autre. Le Tour, c’est le seul évènement sportif où le décor est essentiel. Le Tour de France, c’est de la découverte, c’est de l’histoire, de la géographie, de la culture. Et puis, il y a une vraie fierté pour les gens de voir leur petit village à la télé.

Moi, j’assume et je revendique les grands départs de l’étranger à la condition qu’on aille à Saint-Léonard-de-Noblat, à Laruns, à Loudenvielle, à Castelnau-Magnoac. Les très grandes villes étrangères qui font que les étrangers s’intéressent au Tour et à la France c’est bien, mais il faut aussi qu’il y ait nos petits villages.

Avant le Covid, 11 millions de touristes britanniques passaient par-dessus la France pour aller en Espagne. Si une petite fraction ont découvert la France grâce au Tour et viennent chez nous… alors on ira au-delà de l’aspect sportif.

Le Tour de France est la seule compétition sportive qui s’adresse aussi à des gens qui n’aiment pas spécialement le sport. Il faut parler à tout le monde, aux gens des grandes villes, françaises comme étrangères, et aux gens des petits villages qui souvent se sentent malheureux. Si le Tour leur rend un peu de fierté, c’est bien."

 

Ses premiers souvenirs du Tour

 

"Mon premier souvenir du Tour, c’est chez mes parents. La télé en noir en blanc et Jan Janssen qui gagne le Tour de France, en 1968. J’ai sept ans. Je n’ai absolument pas suivi le Tour 68, mais j’ai cette image-là. 1968, ce sont mes premiers souvenirs de sport : il y a eu Jean-Claude Killy aux Jeux de Grenoble (triple champion olympique) et Jan Janssen sur le Tour de France : je revois un monsieur à lunette (Janssen) entouré de photographes, de cameramen, de journalistes. C’est la première image.

Après, mes premiers souvenirs au bord de la route, c’est dans les Alpes, au col de Cou, en Haute-Savoie, près du lac Léman. Ce col figure au parcours cette année. Mais je n’ai pas demandé à Thierry Gouvenou (directeur technique du Tour de France) de le mettre. Je lui ai dit, ‘’ça part de là, tu fais la Ramaz, Joux Plane’’, en me disant, j’espère qu’il ciblera le col de Cou. Il connaît l’histoire.

"Ce jour-là, j’étais à la fois très heureux d’avoir vu le Maillot jaune Eddy Merckx et très malheureux car je n’avais pas vu Raymond Poulidor. Et pourtant, le peloton était plus réduit à l’époque. Et c’est “Poupou” qui m’a donné l’amour du Tour. Et cette étape du puy de Dôme du 9 juillet, vous savez d’où elle part. Il ne pouvait pas y avoir une autre ville que Saint-Léonard-de-Noblat."

Cela m’a permis de voir passer le Tour et de découvrir le tour à la radio, le transistor, qui était le média de rêve."

La "satisfaction" de voir les  “15-24 ans” regarder le Tour

"La deuxième tranche d’âge qui a le plus suivi le Tour l’an dernier, c’est les 15-24 ans. C’est une vraie satisfaction. Ce n’était pas comme ça il y a 5 ou 6 ans et ça, c’est largement dû aussi aux champions qui attaquent là où on les attend, mais aussi là où on ne les attend pas.

Le Tour, ce n’est pas un message, c’est une parenthèse d’insouciance, de bonheur. On se souvient tous des moments durs de notre vie. Mais on se rappelle moins des moments heureux. En revanche, on se souvient tous du moment où le Tour de France est passé devant soi, avec les parents, les grands-parents, les cousins. Même si c’est en plaine et que c’est passé très vite. Ces moments de bonheur, d’insouciance, ce sont des moments qui n’ont pas de prix.

Et comme me le disent les élus, le Tour de France est gratuit pour le public. Vous pouvez voir passer devant vous les plus grands champions. C’est la force du Tour de France."

L’avenir du cyclisme

"Je le vois plutôt bien. On a la chance d’avoir une génération d’exception, avec les Pogacar, Van der Poel, Van Aert, Alaphilippe… Les plus grands, les Anquetil, Merckx, Hinault… ont gagné tout de suite. Mais là, ce n’est pas un coureur. Ils sont tous plus forts tout de suite. C’est un vrai changement. Jusqu’à quel âge iront-ils ? J’aime cette émergence de champions qui sont capables d’attaquer tout le temps.

Dans l’étape du Creusot en 2021, Van Aert et Van der Poel se sont échappés pendant 200 kilomètres et ce qui était extraordinaire, c’est que les gens criaient : “Vas-y Poupou”. Ils savaient très bien que c’était Mathieu Van der Poel (le petit-fils du champion limousin). C’était fabuleux.

On a eu un Tour de France magnifique l’an passé. Je rêve qu’il soit aussi beau cette année. Mais ça, on ne le maîtrise pas."

Le mythe né du  duel Anquetil-Poulidor

"(Sur la photo iconique) C’est le mythe. C’est l’une des plus extraordinaires photos de sport, pas simplement du Tour de France et du cyclisme. C’est le symbole d’une rivalité qui a porté le cyclisme et le Tour très haut. Epaule contre épaule, ils manquent de tomber. C’est extraordinaire."

Sa rencontre avec Raphaël Géminiani

 

"On a eu la chance de le rencontrer fin octobre avec Cyril (Tricart, chargé des relations avec les collectivités chez ASO) et Fabrice (Tiano, responsable des relations presse chez ASO). C’est un monsieur qui m’impressionne. Il nous a parlé du passé comme si c’était hier, de lui champion, du directeur sportif, qu’il était, de Jacques Anquetil. Et il nous parlait aussi du Clermont Foot, qui avait disputé un match deux jours avant. C’était extraordinaire. C’était très beau et très émouvant de le rencontrer. Il est encore d’une lucidité impressionnante. J’espère qu’il sera au plus près de nous et des champions le 9 juillet. Et même si personne ne monte au sommet du puy de Dôme, je rêve que lui y monte."

Son prochain rêve

"Ce qui est important pour moi, et c’est en lien aussi avec les jeunes (voir précédemment), c’est le retour au puy de Dôme, mais le puy de Dôme en miroir du col de la Loze. Pour moi, il faut qu’il y ait les mythes du Tour, et incontestablement le puy de Dôme en fait partie, mais il faut aussi des lieux nouveaux pour les jeunes d’aujourd’hui, comme le col de la Loze. Mon rêve, c’est que les jeunes d’aujourd’hui aiment le Tour et aient des lieux mythiques pour eux, comme le puy de Dôme l’est pour moi. Ce sont les racines du Tour de France et l’avenir."

 

Texte : Manuel Caillaud et Raphaël Rochette Vidéos : Valérie Guinard

Загрузка...

Comments

Комментарии для сайта Cackle
Загрузка...

More news:

Read on Sportsweek.org:

Autres sports

Sponsored