À 53 ans, le Puydômois Bruno Genteuil décroche un nouveau titre de champion d'Europe d'athlétisme
17 h 30, Bruno Genteuil gare sa voiture sur le parking du stadium Jean-Pellez, aux Cézeaux. Licencié du Clermont Athlétisme Auvergne (CAA), section ASM, il participe à l’entraînement quotidien dispensé par le coach Jean-François Pontier. Rien ne le distingue vraiment de ses coéquipiers, si ce n’est son âge. À 53 ans, le spécialiste du sprint long est le doyen sur la piste.
"Je m’entraîne uniquement avec des jeunes. Ça me pousse, ça me permet de surpasser mes performances."
Au milieu d’athlètes âgés d’une vingtaine d’années seulement, parfois moins, le quinquagénaire est loin d’être à la traîne. C’est même tout l’inverse.
Un record de France en 2022 sur la distance de 800 mLe coureur de 400 et 800 m est un compétiteur redouté de ses adversaires dans la catégorie master où il enchaîne les compétitions et les médailles depuis plusieurs saisons. Un palmarès impressionnant qui comprend une médaille d’or en relais sur 4x400 m lors des championnats d’Europe et un titre de champion du monde sur 800 m en 2022. Cette saison, ses résultats ont été en deçà de ses espérances. Diagnostiquée il y a quelques mois, la mononucléose a perturbé son début de saison.L'entraînement au stadium Jean-Pellez, à Aubière.
Traitement médical
"J’étais, par moments, fatigué et mes chronos n’étaient pas au rendez-vous. Finalement, le coach m’a fait faire une prise de sang et le médecin m’a dit ce qui clochait."
Un virus qui ne l’a pas empêché de décrocher de nouvelles distinctions cette saison : vice-champion d’Europe sur 800 m et médaillé de bronze lors des derniers mondiaux sur la même distance. À 53 ans, après un traitement médical à base de vitamines et de fer, un mois de juillet consacré au repos, Bruno Genteuil est à nouveau en piste. Il affiche un état de santé remarquable. Lui-même le constate : "Je n’ai jamais été autant en forme." Alors comment fait-il ?
Un début de carrière sous les drapeauxBien qu’il travaille et ne soit pas professionnel - il est monteur réseau électrique chez VB Énergies et services - plusieurs raisons expliquent ses très belles performances. Bruno Genteuil est d’abord un passionné. Jusqu’en 1998, alors militaire au 28e Régiment de transmissions, il court sur 3.000 et 5.000 m sous les couleurs Bleu, Blanc, Rouge de l’Armée de terre. Le haut niveau, il connaît et accède au top 5 européen. Mais, à cette époque, les conditions n’étaient pas optimales pour les sportifs.L'athlète participe à sept séances d'entraînement par semaine.
Le plaisir avant tout"J’étais avant tout un soldat et je partais souvent en mission à l’étranger." Entre-temps, il fonde une famille et transmet la passion du sport à ses enfants Enzo et Maëva. "Je voulais me consacrer entièrement à ma femme et à nos enfants. Et lorsque notre fils Enzo a commencé l’athlétisme à l’USI, vers l’âge de 9 ans, j’ai repris la course", confie-t-il. Si, au début, il rechausse les pointes pour "le plaisir de partager des moments en famille", l’envie de compétition commence à le démanger. Tout bascule l’année de ses 45 ans. Repéré, tout comme Enzo, par le club d’athlétisme de l’ASM, Bruno Genteuil amorce une seconde carrière sportive. Sans doute la plus belle.
À Clermont-Ferrand, il découvre une autre planète. L’environnement est totalement différent. L’amateur touche du doigt la sphère professionnelle.
"On s’entraîne comme les pros. J’ai énormément de chance d’avoir un coach comme Jean-François Pontier."
Grâce également au soutien de son employeur qui lui permet d’organiser son planning, Bruno Genteuil tient le rythme de sept séances d’entraînements six jours sur sept. Au complexe sportif des Cézeaux ou en pleine nature, les séances sont minutieusement préparées par des étudiantes en Staps (Sciences et techniques des activités physiques et sportives).
Un entraînement de professionnel pour le coureur amateurL’athlète est suivi par une diététicienne, un coach mental et consacre du temps à la musculation. Sans oublier le matériel. "J’ai 5 paires de chaussures selon la distance et la discipline." Sans équipementier, ni sponsor - qu’il recherche d’ailleurs - le quinquagénaire progresse tout de même à vive allure et franchi la ligne d’arrivée en vainqueur.
En 2022, il pulvérise le record de France du 800 m en master M50 (entre 50 et 55 ans), lors des mondiaux, avec un temps canon de 2’02”64. L’ancien chrono tenait bon depuis 2014. Le record de Bruno Genteuil a été de courte durée. "Mon record est tombé cette saison, mais je vais faire encore mieux en 2024 !", promet l’habitant de Mareugheol qui siège au conseil municipal. Est-ce qu’il pense un jour être trop "vieux" pour la compétition ? Il sourit : "Je ne me fixe aucune limite. Tant qu’il y a du plaisir, on peut performer !"
Pratique. Afin que les fans d’athlétisme puissent suivre ses performances, Bruno Genteuil a un compte Instagram : Bru-Bru971.
David Allignon

