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Du rire aux larmes : Pierre Vaultier, une carrière à son apogée !

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Double champion Olympique de snowboard cross, 6 fois champion du monde et vainqueur des globes de cristal en 2008, 2010, 2012, 2016, 2017 et 2018, Pierre Vaultier (33 ans) est un athlète qui aura marqué de son emprunte l’histoire du sport d’hiver français. 15 années entre peines, galères et souffrances mais aussi et surtout réussite, consécration et bonheur. Sport.fr a rencontré celui qui a dû prématurément mettre un terme à cette carrière au palmarès incroyable. Sa vie, sa fin de carrière, ses passions, ses titres, ses souvenirs… Il se confie comme jamais.

Tu as eu une carrière bien remplie, quel est ton meilleur souvenir, celui qui restera gravé à vie ?

« Très difficile à dire, en 15 ans, il s’en est passé des choses et elles resteront toutes gravées dans ma mémoire. Ce que j’ai vraiment apprécié, c’est de pouvoir vivre de ma passion, c’est une chance inouïe, partager pleins d’expériences incroyables autour du monde et avec des snowboardeurs des quatre coins de la planète. C’est une vraie richesse d’avoir pu me battre pour mes objectifs et avoir un entourage qui m’a soutenu tout au long ma carrière. Mais s’il devait y avoir un moment un peu plus marquant, je dirais le dernier, en 2018 quand je décroche l’Or Olympique à Pyongchang (Corée du Sud). »

Parles-nous un peu de ce titre en 2018

« C’est une sorte d’apogée de ma carrière, la consécration. Durant ma carrière, j’ai souvent eu du mal à réussir à me mobiliser seulement pour une course et rester focus à 100%. Mais à partir de 2014, les choses ont changé et j’ai réussi à passer ce cap. 4 ans après, j’étais ultra leader aux JO et je n’ai pas failli à la tâche alors que tout le monde m’attendait au rendez-vous. C’était une très grosse étape mentale, technique, stratégique et toutes les planètes se sont alignés ce jour-là. C’est marquant car ça n’était encore jamais arrivé, notamment après 2010 ou j’étais conditionné pour gagner les Jeux. Ce jour-là, je termine neuvième et c’est une énorme déception alors que la victoire était mon objectif numéro un.

En 2018, j’étais favori et j’ai répondu présent, c’est la récompense d’un travail acharné sur plusieurs années. En plus c’était une victoire avec les valeurs du snowboard, celles que j’aiment, le dépassement de soi ou encore le fair play avec les autres concurrents. C’est ma philosophie, la victoire revient au mérite, celui qui arrive en bas et qui passe la ligne d’arrivée en premier. »

Ça fait quoi d’entendre la Marseillaise sur un podium Olympique ?

« C’est émouvant ! Mais après c’est beaucoup moins émouvant que le passage de la ligne d’arrivée. Nous avons la chance de pratiquer un sport où nous avons le résultat instantanément dès le passage de cette ligne. Pas besoin d’attendre en étant stressé, les chronos des autres pour savoir qui l’emporte. Le passage de la ligne d’arrivée, c’est une explosion de joie, c’est inqualifiable comme sentiment ! Mes deux victoires aux JO de 2014 et 2018, c’est un blackout total au niveau émotionnel. C’est tellement fort que je n’ai plus aucun souvenir d’un certain laps de temps après la course, c’est dingue comme sentiment ! »

Clap de fin pour Pierre Vaultier

« À Sotchi, j’avais une bonne étoile ! »

En 2014, tu deviens champion Olympique à Sotchi (Russie) ! À ce moment-là, tu portes une attelle au niveau de la cheville. Peux-tu nous en dire plus sur cette performance exceptionnelle.

« Oui ça aussi c’est un moment particulier de ma carrière. Je ne voulais pas renoncer, jamais ! Quatre années de travail que je ne voulais pas mettre à la poubelle à cause de ce genou. Ce qui m’a permis de réaliser cette performance, c’est l’accord et surtout l’idée du chirurgien. Il m’a expliqué qu’il y avait un problème, une rupture isolée sans aucune lésion au niveau du ligament croisé antérieur du genou. Il m’a dit cette phrase « Pierre, les JO c’est jouable avec une attelle et un gros renforcement avant la course, mais attention si tu rechutes dessus, c’est catastrophique. J’étais abasourdi !

De-là, j’ai suivi une grosse rééducation pour être prêt à relever le défi. Je ne vais pas le cacher, il y a un bout d’abnégation, d’inconscience ou aveuglement de la performance et du travail réalisé qui entrent en jeu. C’était ma bête noire les JO ! Me présenter en 2014 après autant d’échecs en 2006 et 2010 ça m’a forgé. Le challenge, c’était de me remettre sur pied 2 mois avant pour aller aux Jeux. J’ai fais bien mieux avec une médaille d’Or plutôt inattendue. La fin est heureuse, après elle aurait pu être malheureuse et dramatique, mais j’avais une bonne étoile.

Après au fur et à mesure des entraînements, ça se passait bien mieux et j’ai eu la chance de rider sur une neige en ma faveur, très douce très humide. Cette médaille, ce n’est pas seulement la mienne, c’est celle de toutes les personnes qui m’ont soutenu et qui ont cru en moi. Mon épouse, les kinés, les docs, mon équipe, le chirurgien… »

Tu as annoncé mettre un terme à ta carrière à 33 ans, quelles en sont les raisons ? Racontes nous un peu ce moment

« L’annonce de la fin de ma carrière est une décision de longue haleine, pas sur un coup de tête. C’est la continuité d’une grosse galère qui a débuté au mois de juillet 2019. Le commencement c’est un choc sur le genou, une arthrite inflammatoire avec des suspicions de bactéries même si au vu des tests, les spécialistes n’ont jamais trouvé de bactéries. C’est assez flou, assez obscur et cela m’a amené à avoir une perte nette de cartilages. Ensuite, j’ai connu des hauts et des bas et j’ai même pu de nouveau rider en février 2020. Après, j’ai ressenti de grosses douleurs toujours au niveau des cartilages et j’ai été contraint d’arrêter. En septembre, après des IRM et radios, ça commençait à sentir mauvais, les médecins n’avaient jamais vu ça. La décision d’arrêter était donc la plus sage. »

Une fin de carrière anticipée, aujourd’hui, quelle est la suite des événements pour toi ?

« Il y a des objectifs de reconversion après, pour le moment ma volonté est de mettre un terme à cette histoire avec mon genou. Enlever la souffrance car c’est vraiment un gros ralentissement au quotidien. Ensuite si tout se remet en place, il faudra que je retourne sur la planche, c’est impératif. D’une manière adaptée s’il le faut mais je ne pourrais pas faire sans, la glisse me manque trop. Après, je compte me projeter vers de nouveaux horizons et j’espère qu’ils ne seront pas trop éloignés du Snow.

J’ai quelques idées mais c’est trop tôt pour en parler. Pourquoi pas faire quelques vidéos pour montrer le côté esthétique du snowboard et continuer cette passion. L’avantage, c’est que mes partenaires sont encore à fond derrière moi (Serre Chevalier, Red Bull, Bridgestone ou l’armée de terre…) Au fil des années, j’ai construit une relation de confiance avec et je prends ça comme une véritable reconnaissance. Pendant la période covid, j’ai aussi créé une association avec un ami. »

Peux-tu nous en dire plus ?

« Avec plaisir ! Avec un ami, nous avons créé l’association « Tree 2 forest » de l’arbre à la forêt en français. Le but est de planter des arbres, car ça me brûle au fond de moi-même de faire quelque chose pour notre belle planète. Je suis plutôt dans cette dynamique environnementale et nous l’avons monté en août dernier. En 2021, on envisage de mettre en terre 2021 arbres. Nous sommes en contact avec plusieurs écoles pour planifier ce beau projet et nous voulons les planter dans la vallée de Serre Chevalier entre septembre et octobre de l’année à venir.

C’est une conviction qui me tient à cœur, surtout que planter un arbre tout le monde en est capable et c’est bénéfique pour la biodiversité. Nous faisons participer les enfants pour leur inculquer la nécessité de prendre soin de nos forêts. Il faut transmettre ça aux jeunes pour qu’ils reprennent ensuite le flambeau. »

« L’avenir, c’est Merlin Surget ! Un jour il va sortir les bons outils c’est sûr »

Si aujourd’hui tu devais mettre une pièce sur un ou une athlète qui va porter les sports d’hiver et aussi le snowboard en France pour l’avenir ce serait qui ?

« En ski, je vois bien Clément Noël (23 ans) tout fracasser si son dos le laisse tranquille. Je lui souhaite le meilleur parce que c’est un très très bon gars. Alexis Pinturault (29 ans) est aussi sur le coup, mais dans un avenir un peu plus proche, sinon Clément Noël me semble être la plus belle chance.

En snowboard, je pense à Merlin Surget (21 ans). Jeune très compétent, gros potentiel, goofie (pied droit en avant) comme moi. C’est marrant car c’est un petit peu ma copie au niveau style de ride et parfois j’ai l’impression de me voir rider. La boîte à outils est complète, à un moment il va sortir les bons outils c’est sûr. J’espère et je lui souhaite de faire aussi bien et même mieux que moi, il a les capacités pour. »

Le snowboard cross est méconnu en France. Ou en est aujourd’hui la discipline surtout après cette année 2020 et le Covid-19 ?

« À cause du Covid, c’est dramatique ! De ce que je vois, la FIS (Fédération internationale de ski) et les stations de ski n’arrivent pas à trouver une solution. Les courses s’annulent de week-ends en week-ends. Contrairement au biathlon ou au ski alpin, en snowboard cross le programme est light. 7, 8 courses dans la saison c’est déjà pas mal. Je pratique un sport coûteux, en terme de finances qui demande de gros volumes de neige et qui n’est pas bon pour la planète au niveau du CO2. Le snowboard cross n’est pas assez médiatique et il faut ajouter à cela, la conjoncture économique.

Et forcément, le covid ne va pas dans le sens de la discipline et notre notoriété baisse. Le calendrier est dans le flou et cela entraîne des difficultés pour le public et les médias à le suivre. En l’état actuel, ce n’est pas un sport qui est vraiment durable, de mon point de vue. On existera toujours notamment aux Jeux Olympiques car c’est extrêmement télévisuel mais pour ce qui concerne la Coupe du Monde et les étapes en hiver, c’est une autre histoire… »

Questions funs

Une petite série de questions pour en connaître un peu plus sur la vie au quotidien de notre double champion olympique.

Peux-tu nous raconter ta première course en pro et celle au JO ?

« Ma première course en pro, c’était à Valle Nevado au Chili en septembre 2005 et j’avais 18 ans. J’ai été propulsé sur cette course après être devenu champion de France la saison d’avant. J’arrivais comme un cheveu sur la soupe et en un jour, j’ai tout compris au snowboard cross. J’ai trop kiffé le parcours, les gens, l’environnement, un pur kiff ! Je fais quatorzième le premier jour et septième le deuxième jour. C’était ultra positif pour mon premier départ en Coupe du Monde, un super rendez-vous.

Les JO c’est une autre histoire ! 5 mois après, en février 2006 je suis catapulté aux Jeux et là, grosse montée de pression. Je me pose pleins de questions, comment je suis arrivé là ? Pourquoi ? J’ai limite l’impression de ne plus savoir faire de snowboard. Et malheureusement, je fais avant-dernier. C’était un calvaire, j’ai détesté mes premiers JO à fondre en larmes, j’en peux plus du snowboard, je raccroche… un très mauvais souvenir. les JO de 2006 et 2010 m’ont vraiment affecté au plus profond de moi-même. »

Quelle est ta phrase fétiche ?

« Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt. »

Dans ta playlist, tu as quoi en ce moment ?

« Je ne suis pas bien compliqué en musique, je me suis mis un peu de David Guetta, Kygo mais j’ai pas de préférences, ça dépend des jours. Ah si, juste je déteste les variétés françaises. »

Ton jeu vidéo préféré c’est SSX (jeu vidéo de snowboard) ?

« Pas du tout ! Je ne joue pas aux jeux vidéos. Je passais simplement sur un jeu de motocross sur téléphone ou tu te fais catapulter en l’air et tu dois aller le plus loin possible, je ne sais plus le nom exact (rires). J’ai kiffé, ça me rappelle le snow mais pas sur la neige. J’y ai passé un bon moment sur ce jeu. Après je n’ai jamais été un passionné de jeux vidéos, j’aimais sortir dehors et rester jusqu’à la tombée de la nuit dans la neige. Pour dire, mes parents devaient me tirer par la combinaison pour que je rentre (rires). »

D’ou t’es venu cette passion pour le snowboard ?

« Je passais du temps avec mon voisin, plus grand que moi et c’était vraiment mon grand copain. Un jour nous étions sur un tas de neige dans le jardin de mes parents et il m’a dit essaye ma planche et là à 4 ans, j’ai trop kiffer. J’ai ensuite dû bassiner mes parents pour continuer sur cette voix-là. J’ai aussi des bons souvenirs sur les pistes tout seul en train de bien bien galérer (rires). »

Quel champion ou championne admires-tu ?

« Quand j’étais gamin, c’était Luc Alphand (ski alpin) mon idole. En plus on vient du même village et c’est désormais un ami. Aujourd’hui, je suis admiratif de Martin Fourcade en biathlon pour ce qu’il a réalisé. Je le connais bien car il était dans la même école que moi, il a toujours eu cette mentalité de compétiteur. Un vrai champion, chapeau l’artiste ! »

Pour quel autre sport aurais-tu opté si tu avais eu le choix ?

« J’aime bien la moto, mais franchement je suis un vrai passionné de vélo, je suis énormément ce sport. Après je me serais bien lancé dans le trial avec mon vélo, mais en montagne c’est plus chaud. J’adore les vidéos de Danny MacAskill (star du VTT trial) qui, avec ses vidéos dépoussière de manière fun l’image du trial qui, il faut bien l’avouer est très chiant, très relou à regarder.« 

Pour plus d’informations sur l’association Tree 2 Forest cliquez ici !

Merci encore une fois à Pierre Vaultier pour sa gentillesse et sa disponibilité, bonne chance à lui et sa famille pour la suite !

Interview réalisée par Grégory Zerbone, une exclusivité pour Sport.fr

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