Transat Café l’Or : la situation météo des premiers jours de course décryptée par Charlotte Yven

Les trois chavirages de la nuit en Ocean Fifty sont là pour nous le rappeler : la météo de ce début de Transat Café l'Or s'annonce piégeuse… En sortie de briefing météo organisé hier, nous avons échangé avec Charlotte Yven, membre du Team Macif et 2e de la dernière Solitaire du Figaro. Entre de fortes rafales attendues en Manche, une dorsale anticyclonique à traverser dans le golfe de Gascogne et la négociation d'une dépression située très sud au large de la péninsule ibérique, ces premiers jours de course ne seront pas une balade de santé. On vous explique tout !  [caption id="attachment_205309" align="aligncenter" width="500"] Frontologie prévue pour ce dimanche 26 octobre à 14h30. Crédit : Météo Consult.[/caption] Voile Magazine : Quelles seront les conditions prévues au départ et lors de la première nuit de course ? Charlotte Yven : IMOCA, Ultimes et Class40 vont partir cet après-midi dans un flux de nord-ouest d'une vingtaine de nœuds avec rafales qui va forcir dans la soirée à 25/30 nœuds avant de virer à l'ouest dans la nuit… Alors que la tempête Benjamin s'évacue doucement vers l'est de l'Europe, une nouvelle perturbation est attendue au nord des îles Britanniques ce dimanche. Au large, à la latitude de la France, il y a un anticyclone qui pousse une dorsale vers le golfe de Gascogne. Le flux de vent est canalisé entre la dépression britannique et ces hautes pressions installées sur le proche Atlantique et s'accélère en sortie de Manche. Voile Magazine : Les trois flottes commenceront à dégolfer dans la journée de lundi, non ? Dans une météo plus maniable ? Charlotte Yven : Pour les Ultimes, ça va aller très vite. Même si c'est du près, ils ont des moyennes de vitesse très hautes. Les IMOCA, eux, passeront la pointe bretonne dans la nuit de dimanche à lundi. Pour les class40, le calvaire dans la Manche va durer un petit peu plus longtemps mais dès le lundi matin, ils devraient à leur tour passer Ouessant. Passées cet écueil, toutes les flottes vont pouvoir tirer la barre, cap au sud-ouest et accélérer au débridé ! Ensuite, plus ils vont descendre vers le sud, plus ça va mollir en approchant de la dorsale qui barre la route du Cap Finisterre. Ca sera une zone de transition, de molle à bien négocier…

Cette dépression, on peut dire qu'elle sort du flux classique des perturbations automnales

Voile Magazine : Derrière la dorsale, les fichiers annoncent une dépression à 1002 hPa qui circule au large de l'Espagne, très sud en latitude. Une situation météo peu classique ? Charlotte Yven : Cette dépression, on peut dire qu'elle sort du flux classique des perturbations automnales. Elle est stationnaire, coincée devant l'Espagne à la latitude de Gibraltar et sa position est assez incertaine parce que justement, elle n'est pas dans le courant de Jetstream qui mène classiquement les dépressions vers l'Angleterre et le nord de l'Europe. Elle peut se déplacer dans un triangle compris entre l'Espagne, Madère et les Açores avant de s'évacuer en général par l'est. Elle peut aussi se combler sur place, c'est une autre possibilité. Mais comme je l'expliquais plus haut, la vie de ces dépressions là est assez difficile à prévoir… [caption id="attachment_205310" align="aligncenter" width="500"] Situation météo prévue ce mardi 28 octobre à 4h (fichiers GFS). Crédit : Windy.[/caption] Cette perturbation va donc être scrutée de près par le stratège météo du bord puisque toutes les flottes vont devoir choisir comment la passer. Que tu tires vers les Açores ou vers les Canaries, en fait, elle est plus ou moins sur ton chemin. Si tu passes par l'ouest, tu la contournes au portant, par l'est au près. Tout va dépendre de sa position finale au moment de l'aborder, l'idée étant tout de même de privilégier la vitesse au portant à condition de ne pas trop se rallonger la route. Ajoutons que le vent le plus fort (les isobares sont plus rapprochés) est attendu derrière le centre. Le risque reste de couper le fromage trop près de son œil (le centre de la dépression) et de se retrouver dans une zone sans vent avec pas mal de houle résiduelle. Voile Magazine : Quel est la suite du programme, une fois cette perturbation dans le sillage des concurrents de la Transat Café l'Or ? Charlotte Yven : Après cette dépression stationnaire, on voit qu'il y a une autre dépression qui se creuse rapidement derrière, au large des Açores. Mercredi et jeudi, elle va engendrer du vent assez fort avec un front assez étendu qui va venir secouer les flottes. Les retardataires pourraient se retrouver au près, les autres positionnés plus sud devraient toucher un flux d'ouest, du vent de travers pour descendre vers les Canaries. Après on est déjà à 4 jours de prévision donc ça risque de bouger encore pas mal. Les perturbations, ce sont des phénomènes qui évoluent très vite en fait. Ce n'est pas comme les anticyclones qui sont assez coulés, lents et patauds. Les dépressions, ça évoluent beaucoup et rapidement. Et en plus ça dépend de pas mal de paramètres… Voile Magazine : On a ensuite l'impression que l'alizé est très bas ? Pas du tout à la latitude des Canaries ? [caption id="attachment_205311" align="aligncenter" width="500"] L'anticyclone se regonfle très bas en latitude. Situation attendue dans la nuit du jeudi au vendredi 31 octobre (fichiers GFS). Crédit : Windy.[/caption] Charlotte Yven : Effectivement, derrière cette large zone perturbée, l'anticyclone des Açores se reconstitue assez bas. Ça va engendrer pas mal de vent léger autour des Canaries. Et pour attraper l'alizé, il faudra sans doute descendre à la latitude du Cap Vert, pas vraiment le bord rapprochant pour les IMOCA qui doivent laisser l'archipel des Canaries à tribord avant de filer vers la Martinique… Complexe certes ce début de course sans routage mais passionnant pour la stratégie et les coups météo à jouer ! Envie d’en savoir plus, retrouver l’ensemble de notre dossier spécial Transat Café l’Or dans le Voile Magazine actuellement en kiosque ou via notre application téléchargeable sur Google Play ou Apple Store.

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