Imoca. Macif en tête, accélère !
Les dix concurrents ont enfin franchi la deuxième marque et ont accéléré, filant toute la nuit à plus de 20 nœuds dans un flux de sud-ouest soutenu. Le Britannique Sam Goodchild et son équipage à bord de Macif ont creusé l’écart avec les quatre autres équipes qui le suivent de près depuis le Fastnet. La performance du jour revient à Vulnérable, qui excelle dans ces conditions de VMG portant.
Ce jeudi matin, la flotte s’étend désormais sur près de 270 milles, signe que ce changement de tempo a commencé à faire la différence entre les concurrents. Aux avant-postes, MACIF Santé Prévoyance accentue son avance et affiche plus de 30 milles d’écart sur ses plus proches poursuivants. Sam Goodchild et son équipe imposent clairement leur allure, confirmant la belle dynamique amorcée dès le départ. Dans ce contexte intense, l’équipage de 4CAD – La Mie Câline, emmené par Benjamin Dutreux, s’est par ailleurs offert une belle satisfaction en remportant le Sprint 4 – Scogal, entre le Fastnet et Slyne Head.
Un tempo qui change tout
Ce changement de rythme brutal a bouleversé le quotidien des équipages. Après plusieurs jours de vent timide et de progression laborieuse, ils ont retrouvé un mode survitaminé qui réjouit les marins, mais exige une attention de chaque instant. Julien Villion (Malizia – Seaexplorer) illustre parfaitement cette bascule : « On avance enfin à grande vitesse ! Je pense qu’on a couvert autant de distance en dix heures que pendant les deux jours et demi précédents ! Là, on est régulièrement à plus de 30 nœuds au portant. On a enclenché le “mode poney” : on met les œillères et on bourrine pour aller le plus vite possible » Ce mode survitesse modifie profondément la vie à bord. Comme le raconte Morbihannais, «On n’est plus dans un mode où l’on pouvait cuisiner tranquillement et se balader pieds nus. Maintenant, on rampe à l’intérieur, on fait des bonds dans la bannette… mais c’est le jeu. La vie est moins agréable, mais comme ça ne va pas durer trop longtemps, on veut en profiter pour aller vite ». Même sentiment chez sa co-équipière Francescas Clapcich, qui apprécie de retrouver le potentiel de sa monture : « C’est dans ces conditions que ce bateau donne le meilleur de lui-même. Exploiter toute sa puissance et le faire filer, c’est génial. C’est un super sentiment de le voir enfin performer comme il le peut vraiment ! »
Une concentration de tous les instants
À bord de TeamWork – Team Snef, Carlos Manera Pascual confirme cette dynamique retrouvée : « On est vraiment très contents de pouvoir enfin accélérer ! Le vent s’est installé, on progresse vite, et on essaie de maintenir une cadence élevée sans rien lâcher. » Les marins savourent ces sensations, mais la concentration reste capitale : « Sur ces longs bords, on essaie de bien respecter les quarts et de prendre le temps de se reposer. Je pense qu’on a bien anticipé le changement de rythme : on est arrivés dans cette phase sans être fatigués, et ça fait du bien de changer de tempo. C’est assez fou de glisser à plus de 30 nœuds après trois jours passés au ralenti ! » Dans ces conditions, les équipages doivent composer avec un sommeil quasi impossible à trouver. Comme l’explique la navigatrice italo-américaine, « il y a de l’action, notamment des empannages : il faut être prudents, bien réussir les manœuvres et s’assurer que tout le monde est synchro. C’est vraiment difficile de dormir dans ces conditions ! »
Les Hébrides, un passage stratégique
Alors que la flotte continue de foncer plein nord, le champ de tir des Hébrides, zone interdite à la navigation, marque la mi-parcours. Les quatre premiers bateaux ont choisi de raser la côte des Hébrides externes – un chapelet d’îles aux roches métamorphiques précambriennes comme Lewis, Harris, North Uist, South Uist ou Barra –, tandis que Malizia – Seaexplorer (et peut-être d’autres équipages à suivre) préfère contourner la zone par l’extérieur. Ces choix tactiques, à ce stade de la course, pourraient s’avérer importants. Au nord de l’archipel écossais, il s’agira ensuite de composer avec un vent faiblissant pour rallier Ronaldsay, aux Orcades, point le plus septentrional du parcours (59° Nord) que les premiers IMOCA devraient atteindre en début d’après-midi. La suite promet un nouveau défi, comme l’explique Francesca Clapcich : « Il faudra continuer à faire marcher le bateau au maximum et être capables à nouveau de changer rapidement de rythme quand le vent faiblira, pour adapter la voilure sans tarder. » On l’a compris, les choix tactiques et la précision dans les manœuvres feront très probablement la différence dans ce sprint haletant vers le point le plus nord du parcours. Comme le résume Julien Villion : « Chaque mille gagné maintenant pèsera lourd pour la suite. »