Patrimoine maritime : Sauvons le Créac’h de Ouessant, le plus grand phare d’Europe
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À Ouessant, le phare du Créac’h, joyau historique et technologique, est menacé par un déclassement qui remet en question son rôle central dans la sécurité maritime. Une décision qui suscite une large mobilisation, dépassant largement les frontières de cette île emblématique.
[caption id="attachment_193774" align="aligncenter" width="500"] Le phare du Créac’h, Ouessant.[/caption]
Le phare du Créac’h, l’un des plus puissants au monde, est confronté à un avenir incertain. Une étude initiée par la Direction des Affaires Maritimes prévoit une révision de la portée nominale de certains phares français. Le Créac’h, qui domine l’île d’Ouessant depuis 1863, serait rétrogradé en « feu redondant », tandis que le phare du Stiff deviendrait le feu principal d’atterrissage avec une portée de 22 milles nautiques. La portée du Créac’h, quant à elle, serait réduite à 19 milles, une diminution significative pour ce phare historique.
Cette décision a suscité une vive opposition, notamment de la part des Ouessantins et des acteurs maritimes. Christian Dubet, expert des phares et fils d’un ancien gardien du Créac’h, s’indigne :
« Déclasser le Créac’h, c’est lui arracher ses galons et le mépriser après plus de 160 années de service. [...] Classer le phare sans son feu, c’est un non-sens, une coquille vide. »
Un symbole de l’histoire maritime et des prouesses technologiques
Depuis sa mise en service, le phare du Créac’h a joué un rôle crucial pour sécuriser l’une des routes maritimes les plus fréquentées et dangereuses au monde. Il a également été un laboratoire d’innovation. En 1937, lors de l’Exposition universelle, le Créac’h s’est équipé d’une optique révolutionnaire, capable de produire 500 millions de candelas, faisant de lui le phare le plus puissant jamais construit. L’installation de cette technologie unique nécessitait des modifications majeures : une lanterne de 13 mètres pesant 37 tonnes et un système lenticulaire flottant sur un bain de mercure. Cet héritage technique exceptionnel est aujourd’hui menacé par le projet de supprimer ce système à mercure, jugé obsolète et coûteux à entretenir.Une mobilisation locale et internationale
Face à cette situation, l’association Ouessant Vent de Bout’ a lancé une pétition pour préserver le phare dans son état actuel. En moins de deux semaines, plus de 15 000 signatures ont été recueillies, témoignant d’un fort attachement au Créac’h bien au-delà des frontières de l’île. Pour Jacques Caraës, co-détenteur du Trophée Jules Verne, le Créac’h est bien plus qu’un phare :« Il est notre appel du large [...] un guide, une bienveillance après 48 jours de mer pour faire le tour de la planète. [...] Longue vie au Créac’h. »
Un repère irremplaçable pour les marins
Le phare du Créac’h ne se limite pas à sa fonction patrimoniale. Il reste un repère vital pour les marins, plaisanciers et pêcheurs côtiers. En mer, la fiabilité des équipements électroniques ne peut rivaliser avec la lumière rassurante d’un phare, surtout en cas de panne ou de conflit entraînant des interférences GPS.« Même avec une cartographie et son point GPS, un marin sera toujours plus rassuré en relevant un phare de visu qu’en regardant son écran », souligne Christian Dubet.De plus, le Créac’h marque symboliquement le départ et l’arrivée de grandes courses au large, comme le Trophée Jules Verne, contribuant ainsi à l’âme des récits maritimes contemporains.
Un enjeu patrimonial et culturel
Classé monument historique, le phare du Créac’h est également un trésor culturel. Situé au cœur de l’île, il abrite un musée dédié à l’histoire des phares et balises, dont la rénovation a bénéficié d’un investissement de 11 millions d’euros. Déclasser son feu revient à dénaturer cet édifice emblématique.« Tous les Ouessantins ont des souvenirs avec le Créac’h. [...] Sa lumière bienveillante donne le chemin », raconte un habitant, témoignant de l’importance affective du phare.
L’avenir du Créac’h en suspens
La prochaine étape se joue sur le plan décisionnel. Les voix des habitants, des marins et des passionnés résonnent pour défendre cet emblème de la sécurité maritime. Les opposants au déclassement espèrent que l’État reverra sa position, intégrant l’importance patrimoniale, historique et fonctionnelle du Créac’h. La mobilisation continue, avec l’objectif de rappeler que le Créac’h, bien plus qu’un phare !
Source communiqué de presse du Vendée Globe.