Vendée Globe 2024. En direct avec Justine Mettraux : « Avec encore 6000 milles à parcourir avant l’arrivée, tout reste possible »
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Pour son premier Vendée Globe, Justine Mettraux, dixième au classement réalise une course très aboutie. Engagée dans une course poursuite le long des côtes sud-américaines qui pourrait lui permettre d'entrer dans le top cinq, la skippeuse de TeamWork Groupe SNEF s'est confiée à Voile Magazine.
Voile Magazine : Bonjour Justine, comment vas-tu ? Pas d'avaries majeures à bord depuis la perte de ton J0 et après 26 jours passés dans le Grand Sud ?
Justine Mettraux : "La navigation actuellement n'est pas des plus agréables, mais ça va encore. On est dans 25 nœuds au près le long des côtes de l'Amérique du Sud. Ça tape encore pas trop, ça va... Physiquement, je me sens plutôt en forme. Quant au bateau, ça a l'air d'aller, ça tient le coup pour le moment. Côté avarie, j'ai eu de la chance. Après la perte de mon J0, j'ai pas eu d'autres soucis sur les voiles. Rien excepté la perte de mes aériens de tête de mât."
Voile Magazine : Comment vas-tu faire pour compenser la perte de cette voile sur cette remontée de l'Atlantique ?
Justine Mettraux : "On verra, de toute manière je n'aurais pas le choix, je suis obligée de faire avec. Soit en privilégiant les routes qui sont assez lofées ou celles qui ont un pourcentage réduit d'utilisation du J0. Quoi qu'il en soit, il faut que j'essaie d'utiliser au mieux les autres voiles que sont le Fro (gennaker fractionné) et le Mast Head pour justement compenser ce manque là."
Voile Magazine : Tu avais l'air très émue au passage du cap Horn, ça représente quoi pour toi dans ta carrière de coureuse au large ?
Justine Mettraux : "Le cap Horn, c'est toujours un passage important dans une carrière de marin car on le passe pas beaucoup de fois dans une vie. Ca fait 15 ans que je fais de la course au large et c'est seulement mon deuxième cap Horn, le premier en solo. Voilà, ça reste des moments assez exceptionnels donc je pense que c'est aussi pour ça qu'il y a de l'émotion et puis comme je le disais dans la vidéo, moi, ça m'a pris un moment de réussir à monter un projet Vendée Globe. C'est pourquoi, je pense qu'il y a encore plus de satisfaction d'avoir réussi à passer ce fameux cap."
Voile Magazine : Tu navigues dans un groupe assez compact avec cinq concurrents qui ne sont pas très loin de toi, est-ce que tu vois une opportunité météo dans les jours à venir pour leur passer devant ?
Justine Mettraux : "C'est difficile à dire parce que la météo n'est pas très calée donc ça ne donne pas envie de prendre trop de risques non plus pour l'instant, en tout cas c'est ce que je me dis. J'ai l'impression que le groupe va continuer plutôt une route un peu est, rester au près encore un petit moment.
Il y avait aussi la possibilité de passer le front dans lequel on navigue actuellement et d'aller vers l'ouest chercher d'autres choses. Ca donnait assez envie parce que c'est moins de navigation au près mais ça avait l'air pas assez calé pour jouer cette option ou trop risqué à mon avis. Donc, voilà, on va voir, pour l'instant je me dis qu'il faut prendre les prévisions météo les unes après les autres parce que ça bouge pas mal et puis on verra plus tard s'il y a des opportunités... "
[caption id="attachment_193034" align="aligncenter" width="500"] Crédit : Gauthier Lebec.[/caption]
Voile Magazine : Ton classement, dixième au pointage de 11 heures, est-il à la hauteur de tes espérances sportives ?
Justine Mettraux : "Oui, je pense que vu les bateaux qui sont devant moi, c'est à peu près ma place. C'est déjà super de pouvoir être aussi proche de bateaux comme ceux qui sont juste à côté de moi, après plus de 50 jours de course. C'est vrai que sur les autres courses de la saison, j'ai souvent fait des meilleurs classements que ça, mais c'est aussi parce qu'il n'y avait pas forcément tout le monde sur les autres compétitions ou parce que certains bateaux qui sont devant moi avaient des avaries. En plus, le gros de la flotte des IMOCA neufs, des bateaux très complets et compétitifs, ont bien tenu le coup, donc ils sont toujours là. Ça joue aussi sur les classements."
Voile Magazine : Tu penses que ton bateau, l'ancien Charal, est un peu moins bon en VMG descente dans la brise que les nouveaux foilers ? Justine Mettraux : "Non, je pense que c'est en général, il y a des moments où je n'arrive pas à aller aussi vite dans la mer formée. C'est aussi vrai que les bateaux neufs arrivent à tenir des moyennes qui sont vraiment très soutenues. Alors après, est-ce qu'ils acceptent de plus tirer sur le bateau ? En fait, je pense que c'est surtout le potentiel du bateau qui explique cet écart. Mais dans le sud, je ne me suis pas sentie trop handicapée..." Voile Magazine : Est-ce que tu es pressée de franchir la ligne d'arrivée ? Justine Mettraux : "Non là ça va, je suis bien. C'est vrai qu'avant de passer le cap Horn, tu fais un peu le décompte et puis maintenant que c'est passé, tu te dis, de toute façon, il y a encore pas mal de chemin. Moi, je crois que j'ai encore 6 000 milles à faire, donc c'est à peu près deux transats. Donc voilà, tu repasses dans un rythme un peu plus au jour le jour, tu essayes de faire avancer le bateau, d'aller au bon endroit sans avoir trop d'attente pour l'instant de l'arrivée. En tout cas, bien sûr qu'en passant le Cap Horn, tu commences un peu à te projeter sur l'arrivée, mais j'essaie de ne pas trop y penser pour le moment parce que c'est encore loin, il peut se passer plein de choses, donc voilà, j'essaie de laisser ça un peu de côté pour l'instant."C'est déjà super de pouvoir être aussi proche de bateaux comme ceux qui sont juste à côté de moi, après plus de 50 jours de course