Vendée Globe. Ralentissement et regroupement au programme
Tous les bateaux de tête ont commencé à ralentir en venant progressivement buter sur une dorsale anticyclonique qui ne dit pas son nom. Alignés et répartis sur une ligne d’environ 100 milles nautiques, chacun cherche à trouver le « trou de souris », rêvant de s’en extirper le premier pour filer dans les alizés et aborder un Pot-au-Noir qui semble absent. La question reste de savoir si la course va se jouer dans les prochaines 48 heures ou non avec un ou plusieurs bateaux qui pourraient s’échapper.
Thomas Ruyant, le plus à l’ouest, s’est fait un peu oublier à cause d’une légère voie d’eau. Toutefois, sa position pourrait s’avérer un peu plus favorable pour espérer franchir la dorsale avant les autres. Il se trouve 34 milles au nord de Charlie Dalin, qui devance Jérémie Beyou. À 80 milles derrière eux, Paul Meilhat, légèrement en difficulté, pourrait profiter de l’occasion pour recoller au peloton de tête.Si l’ancien figariste habitué à l’exercice a conscience que beaucoup de choses vont se jouer « dans la capacité à aller vite dans le petit temps », il a aussi conscience qu’il y a dans ces conditions « toujours une petite part de réussite ! ». Son seul souhait ? « J’espère que ça ne va pas générer trop d’écarts si ça se passe pas très bien pour certains ! ».
En attendant cette épreuve de patience, les nerfs des marins sont déjà mis à rude épreuve par les conditions rencontrées dans la nuit. Car la dépression stationnaire, en plus de bloquer les alizés, génère des grains orageux particulièrement intenses. « On a quand même une instabilité du vent qui est incroyable, j’ai rarement navigué avec du vent aussi instable en force et direction », expliquait Paul Meilhat, qui en a pourtant vu passer. On a des grains et du coup on passe de 10 à 25 nœuds, donc on navigue très toilés mais c’est assez stressant. » Le marin de Biotherm, « très très fatigué », a d’ailleurs subi hier « un petit accident dans le cockpit, je suis tombé dans un départ au lof, j’ai pris un traversier de cockpit en latéral. Mais ça va, j’ai pas trop trop mal et surtout j’ai réussi à bien me reposer les dernières 24 heures. »
Jean Le Cam a opté pour une route très à l’est avec Conrad Colman qui lui a emboité le pas. Une route qui pourrait bien passer pour les bateau à dérives.
Des grains qu’a rencontré à son tour cette nuit Louis Duc (Fives Group – Lanta Environnement), qui a connu ses premiers déboires dès le deuxième jour avec un de ses safrans. « Ce qu’on savait mais qu’on a oublié à un moment donné, et je suis pas le seul je crois, c’est qu’il fallait faire un tour du monde ! On a continué d’attaquer et forcément quand t’attaques comme sur une transat, il y a des petits soucis qui peuvent arriver ! », s’amusait en fin de soirée le skipper normand, avant de reprendre le récit de ses misères.
Après l’histoire de mon safran, j’avais dans l’intention d’être très raisonnable mais j’avais perdu des milles sur tout le monde alors ça m’énervait donc j’ai attaqué un peu sous petit spi et il a dégagé par le bas. Bon, celui-là c’est réparable, donc je vais avoir un petit chantier couture d’ici quelques jours. Mais comme le petit était cassé, qu’est ce que j’ai fait ? Bah j’ai mis le grand ! Ca allait bien, j’allais plus vite encore ! Sauf qu’à un moment, les conditions c’était entre 18 et 32 nœuds, il y a eu une sortie de piste, et là le spi a explosé, je me suis retrouvé avec des morceaux dans tous les sens, ça m’a pris deux heures à larguer complet. J’ai la petite satisfaction de n’avoir rien laissé à la mer et d’avoir tout récupéré, ça je suis assez content !
D’ailleurs, hors de question pour le skipper de Fives Group – Lanta Environnement, actuellement 30e au classement, de se miner le moral, lui qui a « pris un énorme plaisir aujourd’hui, avec le bateau qui glisse, des couleurs magnifiques, un coucher de soleil avec une pleine lune, et ça c’est des moments qu’on aime. » Serait-ce d’accomplir son rêve de Vendée Globe qui le rend aussi épicurien et sage ?
Ce début du tour du monde, il est hyper intéressant parce que ça permet de voir tous les petits défauts pour avoir un bateau opérationnel pour les mers du Sud, c’est pas si mal que ça ! On dit une emmerde par jour, moi j’ai bien attaqué le quota ! Je pense que j’ai un peu de rab maintenant !
Louis
Duc
Fives Group – Lantana Environnement
14 NOVEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau Coup de Pouce lors de la course à la voile du Vendée Globe le 14 novembre 2024. (Photo du skipper Manuel Cousin)
14 NOVEMBRE 2024 : Photo envoyée depuis le bateau Coup de Pouce lors de la course à la voile du Vendée Globe le 14 novembre 2024. (Photo du skipper Manuel Cousin)
« Je ne veux pas me brûler les ailes »
Mais si les premiers ont déjà commencé à ralentir, la queue de flotte, elle, est toujours sous l’effet du gros de la dépression. Après avoir passé l’île de Madère, où Maxime Sorel ( (VandB – Monbana – Mayenne) a pu se mettre en sécurité dans la soirée, Manu Cousin (Coup de Pouce) faisait part de conditions « très instables, avec du vent qui oscille entre 20 et 40 nœuds, il faut être dessus tout le temps, c’est assez fatiguant et on n’a pas beaucoup dormi depuis le départ ! »