Vendée Globe. Maxime Sorel vise un top 5
Maxime Sorel prendra le départ, à bord de V and B – Monbana – Mayenne, de son deuxième Vendée Globe. Le parrain national de l’association Vaincre la Mucoviscidose est prêt. Depuis la mise à l’eau de son foiler en juin 2022, celui qui a gravi l’Everest, le vrai, et son équipe, se sont préparés.
Ingénieur en génie civil de formation, Maxime Sorel a commencé à Cancale par la voile légère, le Multi50 puis le Class40. Il remporte la Transat Jacques-Vabre en 2017 avant de passer en Imoca et de se lancer sur son premier Vendée Globe en 2020. Il fait alors une course exceptionnelle, terminant à la 10e place avec son bateau à dérives. Ses partenaires le suivent à nouveau pour ce Vendée Globe, rehaussant les ambitions du skipper. Il construit un bateau neuf avec MerConcept — un sister-ship d’Apivia, le bateau de Charlie Dalin. L’objectif est de se hisser dans le top 5. Pour se préparer, Maxime se lance également un autre défi : gravir l’Everest pour porter les couleurs de Vaincre la Mucoviscidose, association qu’il défend depuis 2014. Ce sera son projet « Mon Double Everest ». Un véritable exploit. Il termine 5e de The Transat et 12e de la New York – Vendée, et démontre qu’il faut compter avec lui.
Dans quelle mesure, te sens-tu libre dans la vie ?
Je n’ai pas l’impression de m’empêcher de vivre certaines choses. Oui j’ai l’impression d’être libre en quelque sorte. Je fais mes choix et je les assume. C’est rare pour moi de faire quelque chose que je regrette même s’il y a une réflexion en amont. J’ai besoin d’être bien entouré mais pas que l’on m’emprisonne. Ma liberté c’est également de grands moments de plénitude dans mes aventures. En mer, c’est difficile de sentir ces instants car c’est un exercice d’endurance fort, plus de deux mois par exemple sur le Vendée Globe. J’ai senti cette plénitude, sorte de grande liberté entre le camp 4 et le sommet de l’Everest par exemple et c’est d’ailleurs difficile à décrire. Tu as l’impression qu’il y a une énergie particulière qui arrive et qu’il peut se passer de chouettes trucs sans visualiser la fin. Pour revenir à la course à la voile, j’ai tendance à canaliser ces sensations et à les garder pour la fin. J’ai par exemple été frustré lors des dernières 24 heures de mon dernier Vendée Globe de ne pas pouvoir lâcher les chevaux mentalement sur ma dernière ligne droite, la faute à une méchante dépression. J’ai ressenti tout de même quelques moments de grande liberté, de succès également lors de cette épreuve notamment lorsque j’arrive à réparer mon J2 au prix d’un effort quasi surhumain. Au moment où j’arrive à nouveau à hisser cette voile, lors de la réparation, je sentais que c’était un truc unique, l’émotion était énorme, je pleurais.
À l’approche du départ de ton deuxième Vendée Globe, repenses-tu à ton premier ?
J’ai occulté mon premier Vendée Globe. Une course ne ressemble jamais à l’autre. J’ai pris le bon dans le but de préparer celui-là. Je vais revivre une nouvelle aventure et basta.
Qu’as-tu appris en 4 ans ?
Nous avons 4 fois plus de salariés dans mon entreprise. On a 4 fois plus de courses réalisées en IMOCA. J’ai vécu beaucoup d’aventures extra voile avec l’Everest notamment, le Kilimandjaro. Mon corps est chiffré grâce à une préparation physique très pointue. C’est aussi de nombreuses rencontres. En 2014 après la Route du Rhum, jamais je n’aurais pensé en arriver là. Je n’ai pas vraiment changé. Je suis toujours aussi “chiant” avec les personnes avec qui je travaille. J’ai vieilli quand même. Je ne vois pas les années passer. J’ai envie d’aller plus loin et pas toujours dans la voile qui est mon métier. Je suis très animé. Je prends autant de plaisir à faire une randonnée en famille qu’à prendre le départ du Vendée Globe. Je mets toujours beaucoup d’énergie.
Tes atouts, tes faiblesses ?
Je veux toujours rendre une copie parfaite. C’est une faiblesse à mon avis. Je me mets beaucoup de pression par rapport à l’enjeu. En bateau, cela se démontre par le nombre de manoeuvres sur 24 heures. J’ai tendance à faire des changements de voiles ou des manoeuvres pour pas grand-chose alors qu’un empannage suffirait. Je dois être plus patient, accepter d’attendre. Qu’est ce qui fait que j’ai toujours besoin d’être perfectionniste ? Je travaille cet aspect. Côté atout, plus c’est dur pour les autres, plus j’ai l’impression que c’est facile pour moi. C’est un sacré avantage en mer à mon avis. En première année d’IUT, j’avais eu une très mauvaise note. Je me vois me regarder dans le rétroviseur me disant mais qu’est ce que tu fais là. À partir de ce jour, je n’ai plus rien lâché et j’ai fini par devenir ingénieur.
Qu’est ce qui te fait reprendre le départ du VG ?
Ce sont des bateaux totalement dingues. Quand on voit notre bateau à l’image, on se dit que ce n’est pas nous à bord. Abattre des moyennes délirantes, voler est très, très grisant notamment à plus de 25 nœuds dans des mers déchaînées. Voilà pourquoi je repars.
Comment te situes-tu par rapport à ta concurrence ?
Nulle part. Je ne m’intéresse pas à ma concurrence, vraiment et très sincèrement. Les plus belles courses que j’ai faites, la Route du Rhum et la Transat CIC, c’est vraiment quand je vis ma vie à bord sans me focaliser sur ma concurrence. Je fais ma course. Je ne suis pas les autres. Je fais mes trajectoires. Je ne télécharge d’ailleurs pas toujours les fichiers météos.
Quel est ton rapport à la solitude ?
Il y aura forcément des coups de mou sur le Vendée Globe mais j’ai l’expérience de mon premier où j’avais eu lors de la descente de l’Atlantique de véritables manques des autres. J’avais d’ailleurs beaucoup écrit sur la solitude. Là, je me sens prêt à être seul alors que ce n’est pas dans mon tempérament. Je suis plus un homme de collectif.
Quelles sont tes fiertés ?
Avec mon frère Jérémy, nous sommes arrivés à un projet génial et très abouti avec un budget bien moins important que les grandes équipes. C’est une fierté pour un gars comme moi qui coulait du béton et pour un prof de sport comme mon frère. Nous sommes des autodidactes complets. Nous avons fédéré. Nous avons un top stand en immersion sur le village du Vendée Globe. 2 millions d’euros de budget par an, 1 million pour le bateau, 1 million pour le reste, nous sommes le meilleur ratio qualité-prix du circuit IMOCA.
Tu vas te divertir à bord ?
Je vais me faire envoyer les news de la F1, mon père me fait suivre pas mal d’actus, j’ai des films à bord et un tableau excel !